24 décembre 1954 début de la
télévision
en Algérie
Mire R.T.F Alger
 
1955 la Télévision d'Algérie a un an d'existence. Il n'est pas nécessaire de redire ici le succès qu'elle a trouvé au-près des Algérois. Malgré sa jeunesse, elle est déjà la « Grande Dame » présente dans presque tous les foyers.
Tout a été dit sur cet art nouveau.
Tout, hormis une chose : la Télévision d'Algérie est la première au monde a être bilingue. La première aussi (après une existence éphémère de la Télévision marocaine) à émettre des spectacles français et arabes commentés dans les deux langues.
 
 
Pendule était en mouvement perpétuel pour éviter marquage du tube de la caméra sinon à la reprise des programmes le lendemain la pendule indiquait la fin des émissions de la veille à l’heure du couvre feu.
 
 
Télévision algéroise compte deux speakerines musulmanes : MME Kechroud et MME Farida. Nous voyons dans le studio encombré de câbles de projecteurs de caméras MME Kechroud présentant en "direct" et en langue arabe le programme du jour. Les speakerines françaises et musulmanes apparaissentà tour de rôle sur l' écran, les unes émettant en direct et les autres en voix "off" , le lendemain les rôles sont intervertis.
 
Et celà, en partant d'une vulgaire caméra d'actualités enroulée dans une vieille couverture !...
C'était le 1er décembre 1954. MM. Ramettre, metteur en scène, et Tahar Hanache, cameraman, débarquaient à Alger en voyage détude pour le compte de la Radiodiffusion. Le but de leur déplacement : explorer les possibilités de réaliser des courts métrages en prévision de la future Télévision algérienne. Vingt quatre jours après, exactement, dans un hangar désaffecté de la station émettrice radio des Eucalyptus, le premier tour le manivelle était donné pour un court métrage arabe ! Les prises de vues s'effectuèrent avec une « Cameflex », caméra destinée surtout aux actualités. Trop bruyante, on l'avait emmitouflée dans une vieille couverture militaire et mis le tout dans une caisse de bois. Les artistes musulmans promus d'emblée acteurs de cinéma, tournèrent à la lueur de sunlights de fortune. dans des décors calés avec des bouts de bois...
 
   
ci-contre
Une sène des "muets" de Rouiched
de gauche à droite
Fadhila Dziria Aouicha et Keltoum.
 
     
 
 
     
 

Un scène du sacrifice inutile

(scénario de Abelhalim Raïs).
Un véritable grand film avec scènes extérieures et une importante mise en scène de Mr. Ramettre.
Deux des protagonistes du drame les trafiquants "Mohamed Fouaa et Abderrrahmane Aziz tournent une une scène sur les quais d' Alger.
A la caméra Tahar Hanache
 
     
C'est qu'en effet, pour la partie musulmane tout était à faire. Si la chaîne française pouvait bénéficier des bandes métropolitaines, les émissions musulmanes n'avaient strictement rien pour meubler leurs futurs programmes. Il fallait donc brûler les étapes et s'assurer une avance avant le jour " J "
On démarra donc avec les moyens du bord. Et ils étaient plutôt maigres. Mais, par contre, plusieurs scénari, étaient prêts : des sketches de Rouiched, de Reda Falaki, de Mustapha Badi, de Boualem Rais... Les artistes musulmans, possédaient un réel talent et une grande facilité venant la plupart de la troupe Mahieddine, possédaient un réel talent et une grande facilité d'assimilation.
Les commentateurs français et musulmans du Journal télévisé de la RTF d'Alger en novembre 1957.
de gauche à droite : MM Lagaillarde, Delalande chef des commentateurs français , Charles Martin , El Assimi Nourredine, Barnol, Lehtihet, Tadaoui, Houari, Baba Ameur Salim, Assis : M.Bekari Tahar , chef des commentateurs musulmans
 
 
 
     
 
On décida donc de commencer les tournages en attendant l'arrivée d'un matériel perfectionné.
Mais là ne s'arrêta pas l'ambition des pionniers de la Télévision algérienne. Ils décidèrent de procéder à Alger même aux prises de son, au montage et au développement ! En partant de zéro. C'est ainsi qu'à l'archaïque « Caméflex » s'ajouta un magnétophone qu'on « travailla » pour l'adapter aux doubles perforations.
Et ce qui ressemblait à une gageure réussit : la qualité des courts métrages réalisés en fait foi.
Les courts métrages musulmans s'accumulent Certes, tout n'alla pas comme sur des roulettes. « Il nous est arrivé de répéter toute une journée sans tourner un mètre de pelIicule !... nous rapelle Mr Ramettre.
 
     
     
 
 
 
Le commentateur musulman au travail
Monsieur El Assimi, regarde défiler en muet les images d'un film, le casque lui permet d'entendre les dialogues français qu'il traduit en arabe , ce travail exige de sérieuses qualités professionnelles.
 
 
Une actrice de la télévision algérienne
Nadia Wahil en cours de tournage.
 
     
 
Mais l'émulation aidant, la production, avec des hauts et des bas, fit des progrès sensibles. Tout en formant des techniciens locaux et en initiant les artiste; musulmans algériens au nouvel art de la T.V., on réalisa court métrage sur court métrage.
En quelques mois furent tournés : « Les belles-mères » de Mustapha Gribi, avec Fadhila Khetmi, Aouicha, Madjid Reda et Fadh la Dziria, « Les Charlatans » d'Ali Addoun, avec Sissani, Hilmi, Niha, Nabti, « Si El Houari », de Mohamed Touri, avec Mustapha Kateb, Djelloul Bachdjerrah, Wahiba et Nouria, « Les Perditions » de Réda Falaki, « Les Pieds du ciel », des drames de Mustapha Badi (« Un lot pour deux ») et de Boualem Rais. et d'autres encore.
 
     
     
 
Entre temps, de nouveaux appareils perfectionnés arrivèrent ; un studio qui de l'avis des techniciens peut soutenir la comparaison avec ceux de Paris, fut aménagé aux Eucalyptus.
Sur le plan artistique, le « rodage » donnait ses premiers fruits. D'autres films naquirent : « l'argent des Habous » de Mahieddine Bachtarzi, « Le Cadi et la muette » de Mahieddine également, « Fils de la Mendiante », « La Maison Hantée », « Le Malade Imaginaire ». Au total une cinquantaine de courts métrages et un grand film
Sacrifice inutile » furent réalisés.
 
     
Tournage du gros lot de Mustapha Badie
en cours de tournage aux studios des Eucalyptus.
La maquilleuse Fadhila Kehtmi refait une " beauté" à Ali Aabdoun , sous les yeux de Mr Ramettre, Tahar Hanache, Mustapha Badie, Niha et Hilmi.
   
 
  Au studio du Foyer Civique , la diffusion en direct de l'émission enfantine, l'orchestre Franco-Musulman qui anime l'émission procéde à une derniere répétition sous la direction du compositeur Djilali.
     
 
Et maintenant où en sommes-nous ?
Le démarrage effectif des émissions T.V. en décembre 1954 , en mobilisant tous les techniciens formés jusque là, mit en sommeil les activités des studios des Eucalyptus. Les organisateurs vivent sur leur lancée. Ainsi, les programmes musulmans comportent, tous les quinze jours, une émission enfantine en direct à partir du studio du Foyer Civique, et une « musicale », une fois par semaine un court métrage de ceux réalisés aux Eucalyptus, et, enfin, deux fois par semaine, des films commerciaux.
 
     
     
 
Est-ce à dire que le tournage de films musulmans a cessé ?. Non, affirme M. Ramettre, actuellement chef des productions T.V. Seule une question financière nous gêne momentanément. En attendant, dès que l'un des trois studios en cours d'achèvement à la Maison de la Radio, boulevard Bru, sera prêt, on procèdera au moins une fois par mois, au tournage en direct d'une « dramatique ».

Un exemple pour le présent,une formule pour l'avenir

 
     
     
 
 
  Dans les studio provisoires du Foyer Civique , Mustapha Gribi réalisateur des émissions enfantines donne ses ultimes conseils à quelques artistes en herbe.  
     
 
 
  Une scéne de l'inénarable court métrage "les charlatans" de M. Ali Abdoun avec Hilmi, Abdoun.  
     
     
 
Nous avons dit au début que ce qui faisait la particularité unique an monde de la Télévision algérienne était son bilinguisme.
indépendamment du côté artistique musulman, ce qui symbolise le plus cette particularité est le Journal Télévisé : deux chaînes pour une même image.
Pour le profane, commenter en arabe un métrage français et vice-versa, peut paraître enfantin. En réalité un travail technique énorme est nécessaire. Des perfectionnements doivent et sont continuellement apportés dans ce domaine ; aucun effort n'est ménagé.
Les commentateurs arabes étaient au nombre de six : MM. Bekari Mohamed Tahar, El Assimi Naceur Edd'ne E1 Houari Abdelkader, Lehtihet, Khaoua Hacène, et Tadlaoui Fohamed.
 
     
 
 
  Le tournage de l'émission enfantine en direct avec les jeunes artistes.  
Un travail délicat leur est demandé. Après le montage du J.T. par deux monteurs (arabe et français), ces commentateurs visionnent une première fois la bande. En même temps que se déroulent les images, ils prennent connaissance des commentaires écrits (quand il y en a) accompagnant le film. Ils traduisent ou adaptent ces commentaires, puis vient le deuxième visionnage. Au cours de cette scène de travail, les commentateurs synchronisent leur textes avec les images projetées en muet devant eux. Dès lors tout est prêt pour l'émission. Le même processus est employé pour les commentaires en arabe de films commerciaux, de documentaires et émissions en direct.
Pour les reportages (sports, manifestations, cérémonies) tout est laissé à l'initiative du reporter musulman.
Ainsi donc, ce qui donne un cachet particulier à la Télévision algérienne, c'est sa partie musulmane. Ce fait sans précédent méritait qu'on s'y arrête un peu plus qu'on ne l'a fait.