- 1830-1942
- 1830 Etat sanitaire de l’Algérie , l’œuvre
médicale réalisée par les médecins militaires.
- 1942-1962 - Les vingt dernières
années de la faculté de médecine d’Alger.
- 1954-1962 les années d’atrocités.
- Quelques souvenirs personnels.
L’ETAT SANITAIRE DE
L’ALGERIE EN 1830
Le 14 juin 1830 les troupes débarquent à
Sidi Ferruch à la suite d’agissements de pirates barbaresques
en Méditerranée. L’état sanitaire du
14 juin au 5 juillet 1830 date de réédition d’Alger,
les pertes au combat firent 409 tués, mais au 31 août
1830 700 soldats étaient morts de maladie dont 9000 hospitalisés
et évacués vers Marseille et Toulon. En août
1832 le commandement ne comptait plus que 900 soldats en état
de combattre à la suite des épidémies. En 1834
de nombreux militaires meurent victimes du paludisme. Il était
question de rappeler le corps expéditionnaire, le médecin
Maillot grâce à la quinine diminue la mortalité
des troupes. Entre 1831 et 1841 50261 militaires périrent
en Algérie chiffre énorme par rapport aux effectifs
dont 2295 au combat, tout cela malgré le siège meurtrier
de Constantine et le long combat contre l’émier Abd
El Kader. L’œuvre sanitaire débute avec la construction
de 38 hôpitaux, mis à la disposition de 418 médecins
militaires.
Avant 1830 il n’y avait aucune organisation médicale
en Algérie, des guérisseurs pratiquaient une médecine
issue du moyen âge. La dysenterie sévissait en Oranie,
la variole endémique tuait une fois sur deux. La peste et
le choléra n’y étaient importés par les
pèlerins qui revenaient de la Mecque. La Syphilis sévissait
dans 40% de la population.
L’œuvre médicale française serait incomplète
si on ne signalait pas la recherche et l’enseignement.
En 1880 à Constantine c’est Laveran qui découvre
l’agent du paludisme et obtint le prix Nobel plus tard, Henri
Folley continue l’ouvre de recherche dans des instituts spécialisés.
En 1833 dans les jardins du Dey d’Alger, l’enseignement
débute avec comme élèves des maures et des
juifs. En 1835 le ministre de la guerre responsable de l’Algérie
nomme 9 professeurs de médecine. En 1836 le gouverneur Clauzel
supprima cet enseignement de médecins militaires. Il fallut
attendre vingt ans pour le démarrage de la faculté
de médecine d’Alger. C’est le 4 août 1857
que fut crée l’école préparatoire de
médecine et pharmacie d’Alger rattachée à
la faculté de Montpellier et dirigée par le médecin
colonel Berterand. Le 10 novembre 1859 c’est l’inauguration
des locaux de l’école rue Caillet, prés de la
Casbah avec 8 professeurs titulaires et 4 suppléants. Au
début il y avait 21 élèves, en 1870 quatre
enseignants sont rajoutés à l’effectif. En 1877
l’école quitte les locaux de la rue Caillet pour son
emplacement définitif de la rue Michelet. En 1909 elle devient
faculté avant Marseille, elle a 16 chaires, elle en aura
35 en 1959.
On retiendra l’état sanitaire déplorable à
l’arrivée des français en 1830, l’ampleur
de la tâche réalisée par l’armée,
et la création en 1857 d’une école de médecine
qui deviendra faculté. En 1833 grâce à un legs
un hôpital est crée dans les jardins de Mustapha Pacha..
En 1894 création de l’institut Pasteur et dont la direction
fut confiée aux frères Sergent.
1942-1945
Sous l’impulsion de la guerre et à
cause de la coupure avec la métropole, une coopération
naît avec les Anglo-saxons, les médecins d’Algérie
reçoivent les avancées des recherches US (la pénicilline),
l’anesthésie et la réanimation, qui transforment
les conditions de la chirurgie. Les nouveaux arrivants ne cachaient
pas leur surprise de trouver une bonne formation des élèves
médecins algériens, des installations parfois égales
aux leurs.
La transfusion sanguine fut une démonstration tangible de
l’essor de la médecine algéroise. Alger devient
centre de transfusion de l’armée en 1940. Le don gratuit
du sang devient une réalité. Toutes les populations
participent.
Le sénateur Borgeaud installe au domaine de la Trappe une
usine de lyophilisation à ses frais qui permit de livrer
avant la fin de la guerre du plasma. En 1950 le centre de la Trappe
met au point le fractionnement du plasma, en 1962 le centre est
agrandi et bénéficie de 8 lyophilisateurs. A cause
du travail réalisé Alger est choisie pour le premier
congrès de transfusion sanguine en 1953.
Le centre Hospitalo-Universitaire s’est développé
en continu jusqu’en 1962. 20 services seront remodelés
sans cesse avec la construction d’un centre anti-cancéreux
et d’une clinique ORL de premier plan.
Jusqu’au bout ce merveilleux instrument continuera de fonctionner.
La part des urgences augmentera jusqu’à encombrer les
couloirs et le hall d’entrée comme au soir du 26 mars
1962.
C’est par une chaude journée de juin qu’une charge
explosive détruit une coupole du bloc opératoire mettant
fin à cette activité bienfaisante, la passion et la
folie meurtrière des hommes l’avaient emporté
sur la raison.
L’école algéroise avait ses publications : l’Algérie
Médicale, l’Algérie Française Chirurgicale.
La recherche bénéficiait à Alger de conditions
exceptionnelles, il faut citer les travaux de Tournade sur l’adrénaline,
c’est grâce aussi aux travaux du Pr.Verin que les chirurgiens
doivent le scialytique, qui éclaire sans ombre de nombreuses
salles d’opération dans le monde.
J’ai été accueilli sans réticence par
mes collègues, j’ai trouvé un esprit pionner,
un dynamisme propre aux français d’outre mer, si éloigné
de l’esprit étriqué, casanier, petit bourgeois
de la métropole. J’ai développé la cinquième
année de médecine légiste et j’ai mis
en place la médecine du travail, qui venait d’être
crée en France en 1956. Le 1er novembre 1954 éclate
la rébellion dans les Aurès, et cette guerre subversive
s’étend à toute l’Algérie et tout
cela finit par le gâchis final et l’exode massif de
la population européenne, que la métropole n’attendait
pas.
LES ACTIVITES MEDICALES
PENDANT LA GUERRE D’ALGERIE
Les activités médicales pendant la guerre d’Algérie,
les témoins furent frappés dés 1954, par la
cruauté des assassinats commis par les combattants du FLN.
Certes toute guerre est atroce, mais il y avait
des lois de la guerre quant à la façon d’annihiler
l’adversaire avec des armes de guerre reconnues. Il en va
tout autrement quand les victimes sont mutilées avant et
après la mort, le plus souvent à l’arme blanche.
Les victimes sont indifféremment des militaires ou des civils,
des vieillards des femmes des enfants européens ou des musulmans.
Ce sont là des actes de barbarie comme le qualifie notre
code pénal. En arrivant dés 1948 j’étais
particulièrement surpris par la fréquence des morts
par égorgement, quasi-systématique et surtout par
les mutilations génitales et nasales, des actes criminels
inconnus en métropole.
Le professeur Pierre Michaux examine avec l’aide
de diapositives quelques expertises qu’il a dues mener durant
sa carrière de chef de service de la médecine légiste
à l’hôpital Mustapha d’Alger.
1) Un enfant de 13 ans européen égorgé
2) Un musulman de 52 ans ancien combattant et qui pour cette raison
est égorgé.
3) Massacre de femmes et enfants de la mine d’El Allia le
20 août 1953, qui fit 150 victimes civiles et militaires européens
et musulmans.
Souvent les égorgements sont complétés par
des quasi-décollations (coupure de la tête), mutilation
faciale et amputation du nez. Devant de telles atrocités
nous avons avec mes assistants essayé d’expliquer le
mécanisme et avec mon ami André Fornier, nous avons
publié une étude sur cette question dans le numéro
1 de l’Algérie Médicale sous le titre «
aspect particulier de la criminalité algérienne »
c’est en somme ma contribution originale à l’histoire
de cette guerre.
Il faut bien savoir que ces pratiques en occident sont considérées
comme des actes de sadisme sur le plan médico-légal,
et sont extrêmement rares, mais ici au contraire il y a d’autres
causes.
1) Ces pratiques ont toujours existées à toute époque
dans ce pays.
2) Il s’agit de causes plus profondes que l’on ne cite
pas habituellement, en matière de criminalité, à
cause du passé anarchique de cette région et à
cause aussi des mœurs et des coutumes.
3) Certaines pratiques religieuses, l’égorgement d’abord.
Les musulmans sont des sacrificateurs. Le Coran a prescrit des règles
relatives à la tuerie des animaux. Il s’agit essentiellement
du mouton et dès son plus jeune âge le jeune enfant
assiste à la mort de l’animal qu’il pourra sacrifier
quand il sera devenu un homme, mais à la condition qu’il
jouisse à cette époque de toute sa raison, et qu’il
puisse contracter une union conjugale selon la loi coranique. Le
sacrifice consiste à égorger l’animal en lui
coupant complètement le cou, sans enlever le couteau avant
l’entière section de la trachée.
L’égorgement du mouton était pour le jeune garçon
musulman du bled, une cérémonie initiatrice de son
passage à l’âge adulte avec tout que cela comporte,
y compris le fait que devenu adulte il n’a plus d’ordre
à recevoir de sa mère.
On comprend par extension que tout geste meurtrier commence naturellement
pour eux, par l’usage du couteau et par cet égorgement
quelle que soit la victime potentielle.
Je crois que cela reste toujours d’actualité aujourd’hui
encore en Algérie dans leur deuxième guerre avec le
GIA depuis 1992 et aussi dans d’autres secteurs comme la guerre
en IRAK en 2002 et l’affaire du journaliste Daniel Pearl qui
fut égorgé et décapité au Pakistan.
Autre exemple des corps de musulmans retrouvés en Algérie
dans des paniers en 1957, parce qu’ils n’avaient pas
voulu dénoncer leurs patrons agriculteurs.
La mutilation des organes génitaux masculins a été
souvent rencontrée et associée à l’égorgement.
En 1906 un avocat général à la cour d’appel
d’Alger écrivait : « Les corps furent retrouvés
dans une mare de sang entièrement nus et mutilés,
des lambeaux de chair enfoncés dans les dents. C’est
la marque de fabrique indigène et non l’indice d’une
animosité particulière à l’égard
des victimes car le vol était le seul motif.
La rébellion a multiplié de pareils exemples d’une
manière considérable, il faut en trouver la raison
non seulement dans une certaine sauvagerie mais surtout dans le
symbole que représente cette émasculation qui transforme
l’homme, cet être supérieur vu par les musulmans,
en un corps presque semblable à celui de la femme, cet être
inférieur en lui supprimant les attributs de la virilité.
C’est l’explication que l’on peut en donner.
Autre exemple le 10 mai 1954 bien avant les évènements
c’était un militaire musulman un maréchal des
logis tué de cette façon par un de ses hommes nommé
Bachir. Il reçut 54 coups de couteau et l’ablation
des organes génitaux retrouvés dans la bouche, le
mobile était simplement une réforme. Les mutilations
punitives de la face, les cruautés typiques de cette affaire
furent l’objet d’une publication du Pr. Lagrot dans
le numéro 1 du magazine « Afrique française
Médicale de 1957.
En 1957 le gouverneur général Robert Lacoste fait
publier les publications médicales et précise dans
cette étude historique un point particulier en faisant remonter
la pratique des mutilations nasales aux Hindous 2500 ans avant Jésus
Christ
Dans cette publication le docteur Masboeuf de Ténès
précisait : « Le nez dans l’usage courant représente
l’honneur et la dignité » de même que pour
nous le cœur représente le sentiment et c’est
pour cela que l’on dit « tu n’as pas de cœur
», une injure grave à un musulman consiste à
lui dire « tu n’as pas de nez « ou de «
nif » ce qui se traduit par : Tu es un homme sans honneur.
Dans cette même publication le docteur Masboeuf rapporte l’envoi
d’un patient dans le service du Pr. Lagrot le patient que
je vous ai envoyé hier c’est vu tenir le langage suivant
: « Tu écoutes trop » et on lui coupe une oreille
« tu parles trop » et on lui coupe la lèvre supérieure
« tu n’es pas un homme « et on lui coupe le ne
»..
Les mutilations nasales sont les plus employées pour se faire
craindre et obéir, ces pratiques ont été largement
utilisées par les terroristes comme moyen de punition auprès
des musulmans. Des fumeurs et des priseurs de tabac furent victimes
de ces pratiques, le Pr Lagrot traita 20 cas en 1957 dans la seule
ville de Constantine. Cela n’est qu’une partie des victimes
qui n’avaient pas les moyens de se faire soigner en se rendant
dans les grandes villes d’Algérie. Le regretté
Jacques Soustelle avait été particulièrement
choqué par ces pratiques.
L’éventration était également assez fréquente
connue en métropole mais plus fréquente à cette
époque en Algérie. Elle n’était pas rare
et parfois associé aux autres mutilations.
Un cas d’homicide qui s’est produit avant les évènements
le 18 janvier 1948 à Kouba, une femme est entièrement
éviscérée. C’est le mari qui avait commis
ce crime par jalousie il croyait que sa femme avait un amant.
Un autre cas en 1955 commis par les rebelles avec égorgement
avec quasi-décollation d’un musulman dans un village
des Aurès, la cavité abdominale était remplie
de cailloux.
Pour en terminer avec les crimes avec arme blanche, l’homicide
volontaire commis le 12 avril 1949 dans le village de Rouiba une
famille de 6 agriculteurs sont assassinés avec 2 ouvriers
musulmans pour une sordide affaire de vol, avec de nombreux coups
de couteaux.
Un autre fait de guerre l’assassinat d’un docteur auxiliaire
en mars 1956, il fut torturé assassiné avec trace
de brûlures par métal porté au rouge sur le
thorax et l’abdomen, avec brûlure par liquide brûlant
sur l’abdomen, et égorgement médian et latéral
et mutilations des lèvres.
Un autre cas d’un homme Saïd 40 ans enlevé par
le FLN et poignardé avec un couteau de boucher, il est arrivé
sur ses pieds à l’hôpital Mustapha d’Alger,
dans le service ophtalmologique, il avait une lame plantée
dans l’orbite, cette lame avait pour dimensions 2,5 cm de
large et 17 cm de long, tout cela planté dans l’orbite,
cette lame avait pénétré de 12 cm et devait
être dégagée à coup de maillets sous
anesthésie générale.
Nous avons tenté de leur trouver, à ces atrocités,
une explication d’ordre historique, ethnique, et religieuse.
Une explication n’est pas une excuse. Elle montre toutefois
comment il devait être facile pour les chefs de l’ALN
de faire commettre des atrocités qui devaient êtres
naturelles s pour la plupart de ces combattants.
Ce qui permet de comprendre les mécanismes de cette guerre
révolutionnaire et le triple objectif des atrocités
car cette guerre n’a jamais été un soulèvement
populaire, ce n’était pas un soulèvement pour
l’indépendance.
En 1954 l’effectif des rebelles était insignifiant
et c’est pourquoi il leur a fallu terroriser les populations
du bled par des égorgements de nombreuses familles entières,
pour contraindre les populations à se rallier au FLN, en
fournissant des combattants et pour que ces populations coopèrent
pour le renseignement et permettre aux combattants du FLN de vivre
comme un poisson dans l’eau.
Un grand nombre d’atrocités commises contre son propre
peuple, prouve que le FLN était peu représentatif
d’une population qui ne s’est rallié que sous
la terreur des représailles. Il a fallut ensuite qu’ils
terrorisent les agriculteurs français des fermes isolées
du bled.
Puis ce furent les bombes en ville c’était la terreur
urbaine de façon à provoquer la fuite des européens,
c’était la même volonté de terrorisme
à l’état pur. Enfin il fallait terroriser les
jeunes militaires métropolitains. Nous nous rappelons le
massacre de Palestro le 18 mai 1956.
Le but de tels actes étaient de provoquer des ripostes souvent
disproportionnées, aveugles et se retournant contre des populations
civiles irresponsables des exactions.
C’est l’engrenage recherché, le cycle terrorisme
répression aboutissant dans des cas extrêmes a des
actes excessifs commis par des militaires isolés.
Comment voulez-vous que réagissent des militaires qui retrouvent
leurs camarades égorgés, éventrés, émasculés.
La terreur était la stratégie du FLN dans cette guerre
SOUVENIRS DANS L’EXERCICE
DE LA MEDECINE MEDICO-LEGALE
Quelques souvenirs, je fus mêlé comme expert à
des affaires sensibles
AFFAIRE ALI BOUMENDJEL
La première affaire la mort de Ali Boumendjel
qui était un avocat du FLN. Son corps avait été
trouvé à Hussein Dey au pied d’un immeuble où
il était détenu.
Le juge d’instruction pose alors trois questions :
Etait il tombé du haut de l’immeuble : Accidentellement
? Volontairement ? Par suicide ? . Avait il été poussé
?
N’ayant trouvé aucune trace de violences en dehors
des lésions dues au contact avec le sol, aucune violence
externe, ni trace de lutte sur le corps, et sur les vêtements,
la réponse est simple il était mort par précipitation
c’est le terme médico-légal en pareil cas, sans
pouvoir préciser les circonstances ayant précédé
la chute.
AFFAIRE HENRI ALLEG
La seconde affaire c’est celle de Henri Alleg
ce journaliste communiste qui était connu pour son livre
sur la question, ce livre exploité par tous les médias
hostiles à l’armée qui a alimenté la
campagne contre la torture.
J’ai eu à examiner son dossier qui était énorme,
qui m’a été soumis par le juge d’instruction
et je n’ai pas eu à l’examiner, lui Henri Alleg.
Il prétendait avoir été torturé, passé
à la « gégène » comme on dit, il
disait présenter des cicatrices de brûlures électriques.
La question posée par le juge d’instruction était
la suivante. Pouvait on confirmer ces dires par l’examen de
des cicatrices ?
J’avoue qu’en recevant cette mission j’étais
assez ennuyé et même peu compétent car j’ignorais
s’il existait des différences entre les cicatrices
de brûlures électriques, chimiques, thermiques.
En dehors de leur aspect externe. J’ai donc fait la bibliographie
et heureusement j’ai trouvé un article de mon maître
Simonin qui disait qu’il y avait à l’examen histologique
(étude descriptive des tissus constituant les êtres
vivants) des images vacuolaires et qui pour lui étaient typiques
d’une brûlure électrique. J’étais
sauvé en ce qui me concernait. J’adressais le dossier
au professeur Laffargue qui était Pr d’anatomie pathologique,
mon ami était mécontent « je n’y comprends
rien, ce n’est pas mon domaine la question va être posée
par le juge d’instruction ….. » Mais toujours
est il que très curieusement l’affaire n’est
pas allée plus loin. Car la plainte a été retirée.
Ce qui est curieux c’est que personne ne s’inquiète
de ce fait.
On peut se poser bien des questions, de deux choses l’une
ou bien Alleg a menti et n’a jamais eu des brûlures
électriques ou bien ce qui n’est pas non plus à
son honneur il aurait eu peur d’une simple petite biopsie,
il s’agit d’un prélèvement au niveau de
sa cicatrice cutanée, pour faire la preuve de l’origine
électrique de sa cicatrice. Je ne connais pas la suite de
cette affaire.
ABBE SCOTTO CURE DE BAB EL OUED
La troisième affaire dont je me souviens
c’est celle de l’abbé Scotto. Une partie infime
du clergé avait suivi sa hiérarchie en l’occurrence
monseigneur Duval, et avait choisi l’hébergement des
chefs du FLN, et l’accueil des terroristes dans des couvents.
A l’heure où des femmes et des enfants étaient
égorgés par des gens du FLN, on trouvait leurs tracts
dans un presbytère et une ronéo derrière le
maître hôtel, dans tous les pays cela s’appelle
trahison.
Je fus amené à examiner l’abbé Scotto
à Hussein Dey avec le regretté colonel Jeanpierre.
Il s’agissait d’examiner les mains de l’abbé
et à prélever toutes les traces sous les ongles pour
établir qu’il s’agissait de l’encre de
la machine Ronéo et j’ai pu établir la présence
de corps étrangers de même nature que ceux trouvés
sur la machine, fraîchement nettoyée, et qui avait
servi à établir des tracts du FLN.
LES ATTENTATS A ALGER
Et enfin quelques souvenirs du laboratoire de police
scientifique, que j’ai dirigé pendant quelques années,
avant de devenir persona non grata.
J’ai eu cette activité pendant la bataille d’Alger,
elle était très variée cela allait de l’identification
d’armes de poings et de projectiles, à la détection
de débris divers, de détonateurs et de bombes artisanales,
qui firent tant de victimes au début de la bataille d’Alger.
Elles furent déposées par de jeunes musulmanes dans
des brasseries dans des bars ; dans un pied de lampadaire, à
l’arrêt de car, sous le plateau du Casino de la Corniche,
et sous les gradins d’un stade, le résultat des enfants
innocents rescapés mais mutilés pour toujours. J’ai
eu une activité d’autopsie à l’hôpital
Mustapha en 1962 et les derniers mois furent horribles : chaque
matin lorsque j’arrivais à la morgue de Mustapha, je
devais enjamber les cadavres pour arriver à la table d’autopsie.
Je reconnaissais parfois certaines victimes comme le docteur Maxime
Flech de Maison Carrée. Il s’agissait de musulmans
et d’européens presque tous morts par balles par pistolet
automatique ou mitraillette, je me souviens du curé de Birmandréis
qui avait reçu dans la nuque un projectile que j’ai
retrouvé sous la peau dans la région frontale.
Les autopsies étaient rudimentaires, elle consistait à
retrouver les projectiles quand ils en restaient dans le corps.
Quand il restait un projectile dans les corps il fallait le trouver
de façon à identifier l’arme qui l’avait
tiré ? Mais les affaires étaient si nombreuses et
se succédaient à une telle vitesse qu’on ne
pouvait pas les mener jusqu’au bout.
Je ne fus pas commis pour procéder à l’autopsie
des victimes de la fusillade du 26 mars 1962 ou périrent
sous les balles de l’armée française 54 civils
dont 4 musulmans avec 200 blessés. Parmi les victimes figurait
un docteur des hôpitaux Jean Massonat croix de guerre 39-45
qui fut victime du devoir professionnel, tué dans le dos
en portant secours à un blessé. J’étais
personne non grata à cette époque et il n’a
pas pu être établi si les autopsies avaient eu lieu
ou non ni par qui elles auraient été pratiquées
: En tout cas les dossiers ont disparus.
On comprend que le pouvoir ai cherché à faire disparaître
les traces d’un horrible forfait qui sonna le glas de toute
résistance populaire.
Ce qui était l’objectif recherché, car en pareil
cas il faut se demander à qui profite le crime. Les activités
continuèrent à l’hôpital Mustapha d’Alger
jusqu’à l’extrême limite de juin 1962.
Le plus bel hommage que l’on peut rendre à la qualité
du personnel enseignant est de rappeler ce que sont devenus les
79 professeurs titulaires après la diaspora dont ils furent
les victimes. On est bien obligé de constater en l’existence
de cette volonté en haut lieu, d’une volonté
de détruire l’école d’Alger, en éparpillant
les équipes dans toute la France, en 23 facultés métropolitaines,
6 professeurs deviennent doyens par la suite.
La faculté d’Alger ne voulait pas mourir et sous l’impulsion
du Pr Raynaud il réussit à reconstituer pendant une
dizaine d’années « les journées de Mustapha
en Touraine » au château de Dartigny, une revue médicale
fut même crée « L’Antenne Médicale.
J’ai tenté de vous faire revivre au
travers de la faculté de médecine d’Alger la
guerre d’Algérie de 1954 à 1962. Et l’hôpital
Mustapha qui pouvait avantageusement soutenir la comparaison avec
n’importe quelle autre grand CHU de France, et qui rayonnait
depuis 53 ans pour le grand bien de toutes les populations de ce
pays.
Je ne crois pas au sens de l’histoire cette utopie marxiste
maintenant abandonnée. Je pense que l’histoire est
faite par quelques hommes qui à un moment donné imposent-leur
marques sur les évènements pour le meilleur et pour
le pire, et ce fut le cas en Algérie de 58 à 62, car
ces hommes malgré leur passé peuvent se tromper lorsqu’ils
sont mus par l’orgueil, le mépris ou la haine.
Et je suis de ceux qui prétendent qu’il fut ainsi pour
l’Algérie dont le destin aurait pu évoluer de
toute autre façon en évitant d’écrire
une des pages sinon la plus honteuse de l’histoire de France.
Les historiens viennent de recommencer à le reconnaître.
Ce n’est qu’un début et j’ai confiance
dans le jugement des historiens qui permettront d’établir
la vérité la plus objective possible.
La population européenne d’Algérie après
l’exode et la dispersion ne se considéra jamais intégrée
à la population métropolitaine qui avait été
conditionné pour la rejeter.
La population musulmane autochtone est dans son ensemble moins heureuse
que du temps de la souveraineté française même
s’il est impossible pour elle de le reconnaître officiellement.
En ces temps où il est question partout de repentance et
de mémoire permanente, on aimerait que le gouvernement français
reconnaisse ses erreurs de la politique algérienne souvent
incohérente depuis 1830 jusqu’à la fin de 1962.
Mais on aimerait que le gouvernement algérien se repente
également pour la façon indigne d’un pays civilisé
dont furent traites les Harkis tout est encore possible.
Il faut cependant garder espoir dans la mémoire des peuples
et croire qu’un jour viendra où cette œuvre sera
reconnue par des générations plus sages ce qui rendra
alors possible la réconciliation pour le grand bien de tous.
Des deux cotés de la méditerranée les relations
confiantes pourront alors reprendre.
Un témoignage personnel avec le courrier du garçon
du laboratoire monsieur Ostman Abdelkader avec qui j’ai correspondu
de 1962-1975. (lecture avec émotion d’une lettre de
Noël 1967)
CONCLUSION
Pourquoi toujours exhiber ce passé parsemé de tant
d’horreurs car nous avons un double devoir de mémoire
d’abord devoir de mémoire à l’égard
des jeunes générations de français d’Algérie
ceux qui ont entre 40 et 50 ans maintenant, et qui n’ont ont
pas connu les faits.
Des faits incontestables et non des rumeurs, ils n’ont pas
eu de récit de leurs parents, ou bien leurs parents ont voulu
gardé le silence, et préféraient tourner la
page, ne voulant pas répondre à leurs questions.
Tous ces jeunes ont ensuite en milieu scolaire reçu non pas
une information objective mais une désinformation systématique
sur l’Algérie. L histoire volontairement tronquée,
faussée, uniquement orientée pour qu’ils ne
gardent en mémoire qu’un slogan.
" Guerre d’Algérie = Tortures de l’Armée
Française".
Vous vous souvenez du film de Patrick Rotman (très mauvais
et très partial) l’ennemi intime. Il faut dire la vérité
à tous ceux qui ne l’ont pas connu, et réhabiliter
l’armée française, car il est intolérable
d’entendre ces attaques ignobles contre notre armée
« tortionnaire », nous avons un autre devoir de mémoire
vis à vis des historiens de profession, qui commencent enfin
à étudier les dossiers et qui écrieront les
livres d’histoire pour les générations futures.
Tous ceux qui ont des faits incontestables doivent le faire sans
les interpréter, sans passion excessive, les faits parlent
d’eux-mêmes.
Il faut être persuadé que malgré toutes les
occultations provenant des survivants de tous les milieux politiques
impliqués, ayant intérêt à cacher leurs
turpitudes et cela va des communistes aux gaullistes, les historiens
honnêtes finiront par écrire la vérité
sur cette période la plus ignoble de l’histoire de
France.
C’est un devoir sacré que nous devons dédier
à la mémoire de tous ceux civils et militaires, français
de métropole et d’Algérie, français Musulmans
du bled ou engagés dans l’armée comme les Harkis
morts au combat ou victimes de tortures et aux victimes d’attentats,
nous devons jamais les oublier ils ne doivent pas être morts
pour rien.
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