en faveur d'une "égalité réelle des chances". "Répondre au défi de la diversité en recourant à des critères ethniques ou religieux conduirait à prendre le risque de dresser les communautés les unes contre les autres et enfermer chacun dans son identité et son histoire", a affirmé le président, en indiquant "avoir mûrement réfléchi" à la question.
Arguant de l'échec du modèle républicain d'intégration - qui assigne à chaque citoyen, quelles que soient ses origines, des droits et des devoirs -, M. Sarkozy a longtemps plaidé en faveur d'une prise en compte explicite de ces origines. Il estimait que c'était le seul moyen de mesurer et de corriger des discriminations persistantes.
GARANT DES MÉMOIRES
Partant de ce diagnostic, M. Sarkozy a multiplié les gestes et les déclarations visant à faire reconnaître l'identité culturelle et religieuse des minorités vivant en France. Ses deux passages Place Beauvau - dans les gouvernements Raffarin (2002-2004) et Villepin (2005-2007) - lui ont permis de creuser ce sillon.
Ce fut d'abord la mise en place du Conseil français du culte musulman (CFCM). Puis des plaidoyers de portée plus générale et systématique en faveur de la discrimination positive - jusqu'à souhaiter publiquement la nomination d'un "préfet musulman" - et de son outil, le comptage ethnique. "Je n'ai toujours pas compris pourquoi certains trouvent choquant que l'on répertorie en France les catégories de populations selon leur origine. (...) Si l'on refuse de reconnaître la composition de la société française, comment pourrons-nous intégrer ceux à qui l'on nie leurs spécificités et leur identité !", s'est ainsi exclamé M. Sarkozy, le 2 mai 2006, lors de l'examen par les députés de son texte sur l'immigration.
Quelques mois plus tôt, M. Sarkozy avait déjà fait une incursion remarquée dans la vaste querelle de frontière entre histoire et mémoire qui avait surgi après le vote d'un amendement sur "le rôle positif" de la colonisation, et relancé de multiples revendications identitaires. En confiant à l'avocat Arno Klarsfeld un "travail approfondi sur la loi, l'histoire et le devoir de mémoire", le président de l'UMP s'était érigé en garant des mémoires ; et des "communautés" correspondantes, qui représentaient des réserves de voix non négligeables dans la perspective de l'élection présidentielle de 2007. M. Sarkozy a toutefois atténué ce type de messages lorsqu'il est entré de plain-pied dans la campagne présidentielle. En décembre 2006, son conseiller Henri Guaino était formel : "La France est foncièrement anticommunautariste. Le principe d'égalité est sa clé de voûte. L'unité est une obsession. On ne peut revendiquer le communautarisme si on veut incarner ce pays."
Deux rapports ont récemment achevé de convaincre le président d'oublier certains de ses anciens penchants. Le 18 novembre 2008, la mission d'information de l'Assemblée nationale sur les questions mémorielles a invité le Parlement à ne plus légiférer sur l'histoire ni prescrire le contenu des manuels scolaires. Un mois plus tard, Simone Veil a remis à M. Sarkozy un autre rapport excluant, celui-ci, toute réécriture du préambule de la Constitution qui permettrait d'instaurer une politique de discrimination positive sur des fondements ethniques.
Jean-Baptiste de Montvalon
Source Le Monde Article paru dans l'édition du 04.01.09.
LE MONDE | 03.01.09 | 13h52 Mis à jour le 03.01.09 | 13h53 |