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Les nombreux Harkis et Rapatriés d’Algérie sont parqués dehors, le procès débutera que vers 16h30 c’est dire l’organisation de ces personnages.
Le père de M. Abdelkader Chebaiki, président de l'association Ajir-34 (Association pour la justice, les informations et les réparations) en faveur des harkis, Mohamed Chebaiki, âgé de 72 ans, a été victime d'un malaise et secouru par les pompiers.
Fatima Besnaci-Lancou, auteur du livre Fille de harki et présidente de l'association Harkis d’extrême gauche avait prévu de faire le déplacement depuis Paris. Elle aimerait que «ce procès montre enfin que les harkis sont des citoyens français à part entière».
Une quarantaine de parties civiles (associations de défense des Harkis, SOS Racisme, Mrap...) se sont présentées ce jeudi après-midi. Environ 200 harkis et sympathisants sont restés massés devant les grilles de la cité judiciaire où était accrochée une banderole condamnant "les insultes de Georges Frêche contre les harkis".
Cette atmosphère électrique expliquait en partie l'absence de Georges Frêche du tribunal. Même si, "dans ce type d'affaires, c'est la coutume. Il eût été anormal qu'il vienne", a rappelé l'avocat et le complice de Georges Frêche, Me André Ferran. Le contexte est très défavorable à celui qui, à 68 ans, se déclare "politiquement socialiste mais philosophiquement anarchiste".
Le procès s'est ouvert peu après 16h30, en l'absence du principal intéressé dans une ambiance tendue.
Le président socialiste de la région Languedoc-Roussillon, connu pour ses dérapages verbaux, comparaît pour "injure envers un groupe de personnes en raison de son appartenance ethnique, raciale ou religieuse". Il risque six mois de prison et 22 500 euros d'amende. Après quelques plaidoiries sur la nullité de la procédure, visant à établir notamment si les propos de M. Frêche constituaient une "diffamation" ou "des injures", deux accusations qui ne sont pas visées par les mêmes textes, des témoins ont déposé en faveur de M. Frêche.
Roland Dessy, Rapatrié d’Algérie, retraité, a souligné que le prévenu avait "tout le temps soutenu avec force, conviction et amour, la communauté des Rapatriés. Lorsqu'il a prononcé le mot de sous-hommes, personne n'a fait de relation avec les (mêmes) mots employés 55 ans auparavant" (sous l'époque nazie, ndlr).
Serge Fleurance, membre du PS, adjoint au maire socialiste de Montpellier, a affirmé avoir été "choqué" le 11 février, après avoir entendu "des injures grossières proférées" à l'égard de M. Frêche par des personnes qui avaient participé le matin à la manifestation de l'UMP.
Ce témoignage a donné lieu à un échange de propos vifs entre l'avocat de M. Frêche et l'avocate d'une association de défense des harkis et une suspension de séance a été ordonnée.
Ce procès sera long puisqu'une dizaine d'associations (défense des harkis, Ligue des droits de l'homme, le MRAP et SOS-racisme...) représentées par autant d'avocats, se sont constituées partie civile. Sept témoins, cités à comparaître, sont également présents.
Pour la défense, Me André Ferran, avait demandé "la relaxe" pour son client. "Dire que les propos de M. Frêche sont une injure raciale, constitue un viol pur et simple de la vérité", a-t-il dit. Il a tenté de s'expliquer dans une lettre lue par la présidente du tribunal, Michèle Monteil. Dans ce courrier, il a souligné avoir été "copieusement qualifié de « cocu » et de « connard", lors de la cérémonie. "Le terme de sous-homme est sorti sur la colère, je voulais dire minus ou minable", a-t-il expliqué.
Mais ce sont les avocats issus de la communauté Harkis , Me Zined Abdelatif Belaoues en particulier, qui, jouant sur l'émotion, ont sans doute été les plus efficaces : "Quand j'ai allumé ma télévision et que j'ai entendu ce mot, j'ai pleuré, dit-elle. Et ma petite fille m'a dit : "Mais alors, mon grand-père, ce n'était pas un homme ?""
Le procureur de la République, Olivier Decout, a repris ces arguments au bond. Estimant que l'injure s'adressait à deux hommes mais "touchait la communauté tout entière", il a renchéri
Dans son réquisitoire, le procureur a fait valoir que les propos de Georges Frêche avaient constitué un "débordement verbal" puis entraîné un "scandale". "Au départ, ces propos s'adressaient à Abdelkader Chebaiki (ndlr: président de l'association Ajir-34 -Association justice, information, réparation pour les harkis), mais ils ont dépassé ce premier protagoniste par la forme scandaleuse qu'ils ont pris", a souligné Olivier Decout. "M. Frêche est-il raciste ?", s'est-il ensuite interrogé. "Je ne le crois pas [mais] on lui reproche d'avoir tenu des propos injurieux à connotation raciste qui s'adressaient à l'ensemble des harkis", a-t-il poursuivi.
Pour Me Patrick Baudouin, avocat parisien représentant l'association Générations mémoire harkis, "15.000 euros d'amende, c'est un peu hors de proportion par rapport aux propos de Georges Frêche et à son comportement".
A l'énoncé du réquisitoire, l'avocat de M. Chebaiki, Alain Scheuer, a qualifié ce dernier de "modéré". Les représentants de plusieurs associations de harkis ont souligné de leur côté leur "colère" et leur "amertume" devant la "clémence" des réquisitions. "Ce sont les valeurs de la république qui ont été bafouées sans que le procureur ne réclame une peine à la hauteur de l'injure", a déclaré l'un d'eux, qui s'est dit "déçu".
La sortie du palais de justice, après les réquisitions, à 1h du matin, a été un peu agitée. L'avocat de Georges Frêche, Me André Ferran, a en effet signé une plaidoirie "très politique et éloignée du sujet juridique, ce qui a énervé une bonne partie de la salle", a rapporté Me Baudouin
Le procureur Olivier Decout a requis jeudi soir à l'encontre de Georges Frêche, une amende de 15.000 euros et la publication de sa condamnation, pour ses propos sur les harkis. Ce dernier, qui a qualifié les propos du président socialiste de la région Languedoc-Roussillon d'"injures scandaleuses qui doivent être sanctionnées", n'a pas requis de peine de prison comme la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse et de l'expression l'y autorisait, celle-ci prévoyant jusqu'à 22.500 euros d'amende et un an d'emprisonnement pour "injure aggravée".
Le tribunal correctionnel de Montpellier a mis son jugement en délibéré au 25 janvier 2007. |
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