L'histoire de l'Organisation Armée Secrète restait
à raconter. Certes on a beaucoup écrit, filmé, témoigné
sur cette OAS fondée en février 1961 à Madrid par Pierre
Lagaillarde et Jean-Jacques Susini. On a beaucoup brodé, accusé,
rêvé, sans trop savoir. On ne peut, en effet, raconter l'OAS
qu'en l'ayant côtoyée ou combattue. En pleine guerre d'Algérie,
sans former un bloc uniforme, de: Nostalgiques de Vichy, fascistes, monarchistes
et poujadistes de toutes origines s'allient à des j déserteurs
pour abattre le général De Gaulle et la république. Leurs
ambitions sont contradictoires ; leurs soutiens mal affirmés, changeants,
insaisissables. Au-delà des desperados d'Alger et d'Oran, combien sont-ils
réellement, ces combattants de l'OAS ? Cinq cents ? Deux mille ? Beaucoup
plus ? Et leurs sympathisants ? Pendant plus de trente ans, j'ai recueilli
des centaines de témoignages. J'ai écouté. Consulté.
Vérifié. Comparé. Et voici, enfin, l'histoire secrète
de l'OAS, qui est mon livre, comme on dit. Moi aussi j'ai été
"Algérie française". J'ai aimé l'Algérie
à en mourir, mais ce livre n'est pas un pèlerinage. Ni un témoignage.
Car si j'étais du fer dont s'est forgée l'OAS, je n'ai jamais
participe au combat des pieds-noirs désespérés. Raconter
l'OAS, c'est revenir une fois encore en Algérie, comme historien cette
fois. Avec distance. Sans langue de bois. Sans parti pris". GF
Commentaire: C'est un livre important, une somme. Il faut le lire.
Cependant quelques erreurs, parfois graves sont commises. Et puis Georges
Fleury a donné une interview à Nice Matin corse. Interrogé
par Jean Contrucci il répond (extraits) : " J'avais la
fibre trop républicaine pour m'associer à certains courants
de l'OAS (...) je suis tombé dans le gaullisme tout petit (..) C'est
certain, je déplore les débordements, les règlements
de compte de tous ceux pour qui appartenir à l'OAS était le
prétexte à vengeance personnelle. C'est le cas des membres du
commando du Petit-Clamrt qui tira sur la DS présidentielle (..) l'OAS
a été très vite récupérée par des
gens qui avaient une ambition plus politique(..) Ils avaient oublié
qu'un homme politique procède par double langage. Celui qui leur avait
dit : "Je vous ai compris" avait déjà en tête
l'abandon de l'Algérie ". JFC
ADIMAD SUD
Histoire secrète de l'OAS
Par Georges Fleury.
Grasset 1050 p, 26 euros.
LA
PROVENCE 12/03/2003
Georges Fleury est écrivain. Il vient de publier "Histoire secrète
de lOAS", aux éditions Grasset
- Quarante ans après la fin du conflit, une majorité de jeunes
Français est encore ignorante des détails de la guerre dAlgérie.
Est-ce la faute de lEtat, qui a longtemps refusé de la qualifier
de guerre?
Georges Fleury : "Ce nest plus le cas aujourdhui. Depuis
lannée dernière, on peut officiellement parler de guerre,
puisquelle a été reconnue comme telle par le gouvernement."
- Pensez-vous que le tabou de la torture soit à lorigine de ce
non-dit historique?
"Sans doute en partie, mais parce quil y a eu et quil
y a encore une incompréhension majeure sur ce point. Pour les
officiers supérieurs de lépoque, le fait de parler de
la torture est toujours interprété comme une attaque contre
eux et, par extension, contre larmée française. Pour les
historiens, il ne sagit pourtant que dévoquer un fait historique.
Lincompréhension vient aussi du pardon qui aurait dû, aux
yeux de certains, suivre la reconnaissance des faits de torture. A mon sens,
il ny a pas de pardon qui tienne. Même si je la condamne fermement,
la torture a été, en Algérie comme ailleurs, utilisée
comme une arme de guerre. Cest quelque chose dassez difficile
à expliquer aux jeunes, car il est délicat de trouver les mots
justes pour en parler. Mais lhorreur, cest moins la torture que
la guerre. La torture est une conséquence de la guerre. Si on ne veut
pas être confronté à lhorreur de la torture, il
ne faut pas faire la guerre. Cest cela quil faudrait enseigner
aux jeunes."
- La façon dont, justement, on leur parle de cette guerre vous paraît-elle
pertinente?
"Ça dépend. Dans certains manuels dhistoire, la guerre
dAlgérie tient en huit ou dix lignes. Ce que les jeunes en retiennent
est forcément insuffisant. Pour eux, cela se résume souvent
au fait que larmée française a brûlé des
villages, violé des femmes et torturé des hommes avant de rentrer
en France la tête basse, ce qui est tout de même un peu simpliste."
- Pour un enseignant, nest-ce pas risqué den parler dans
une classe où cohabitent des jeunes issus de familles pied-noirs, harkis
et algériennes?
"Si on leur dit la vérité, cest possible. Cela peut
même être un facteur dintégration. A lheure
actuelle, on a toutefois tendance à trop simplifier. A décrire
cette guerre comme un affrontement entre deux camps distincts: les Français
dun côté, le FLNde lautre. Aujourdhui, peu
de gens osent ainsi parler de laffrontement qui existait entre Algériens-entre
le FLNet le MNA- et qui a fait autant de morts que le conflit "officiel".
On ne peut pas enseigner valablement la guerre dAlgérie sans
aborder ces aspects-là."
- Comment expliquez-vous que même les acteurs de cette guerre se soient
tus à leur retour ?
"Personne ne souhaitait quils parlent. Chez eux, on leur reprochait
presque davoir participé à ce quon qualifiait à
lépoque "dévénements". Dans toutes
les familles, des hommes avaient fait 14/18puis 39/45. A leurs yeux, lAlgérie
nétait pas une vraie guerre, cétait de la gnognotte.
La seule occasion que les anciens combattants avaient de parler de cette guerre,
cétait entre eux, presque en cachette. Cette chape de plomb a
largement participé à lédification du tabou."
- Aujourdhui, que doit-on dire aux jeunes. Quelles dates, par exemple,
doivent être enseignées pour baliser ce conflit dans le temps?
"Cest un problème. Pour la majorité des Français,
la guerre dAlgérie a débuté le 1er-novembre 1954,
mais certains la font remonter jusquau début de la présence
française, cest-à-dire au 5-juillet 1830, quand larmée
du général de Bourmont est entrée dans Alger. La fin
de cette guerre est également toujours lobjet de querelles qui
ne séteindront, à mon sens, quavec les acteurs du
conflit."
- Une guerre qui na ni début ni fin reconnus par tous, cest
un cas unique?
"La guerre dAlgérie est un cas unique. Dabord parce
quelle na pas été formellement déclarée
mais comment aurait-elle pu lêtre, puisque lAlgérie
était à lépoque une partie de la France? Elle na
donc pas pu prendre fin de façon classique. Puisque désormais,
on admet à juste titre que cétait une guerre, on doit
admettre quau départ, cétait une guerre civile entre
Français".
Une interview de Georges Fleury par Hervé VAUDOIT
- DES
ANCIENS DE L'OAS RACONTENT Vincent Quivy
Ils étaient officier, étudiant, médecin,
industriel, ils sont devenus "activistes" et "rebelles".
Aujourd'hui, "terroristes à la retraite", les anciens de
l'OAS livrent leur vie, leurs motivations et racontent le combat sans pitié
pour l'Algérie française. Cette vingtaine de récits croisés
plonge dans les coulisses de l'histoire, des débuts du contre-terrorisme
aux heures clandestines de O.A.S en passant par les préparatifs du
13 mai 58 ou les dessous du putsch de 1961. Du lieutenant Jean-Marie Curutchet,
responsable de l'OAS Métropole à Pierre Guillaume, " 'Le
crabe-tambour ", de Jean-Claude Perez, un des chefs de l'Organisation
à Armand Belvisi, chargé d'assassiner De Gaulle, de Joseph Rizza,
ancien des commandos Delta à Jean-Jacques Susini, Co-fondateur de l'OAS,
ils forment, eux tous, hauts responsables ou hommes de base, théoriciens
ou plastiqueurs, un portrait de groupe. Celui des soldats perdus de l'Algérie
française. Insurgés contre la république, ils sont devenus,
à l'heure des déchirures, les parias de la Nation. Acteurs,
puis perdants de l'histoire, ils ont, de l'exil à la prison, brûlé
leur existence et subi le déshonneur. Aujourd'hui, entre amertume et
apaisement, ils parlent.
ADIMAD_SUD
DES ANCIENS DE L'OAS RACONTENT Vincent Quivy
Editions du Seuil 19 euros