FUVEAU Dans les bois de Fuveau, l'amertume et la résignation des harkis "oubliés"
 
     
   
     
 
34 ans après son rapatriement d'Algérie Monsieur Hanachi ancien cmbattant et retraité vit dans une baraque avec une famille de 15 personnes au Camp de Fuveau (Bouches du Rhône)
 
     
 

"J'ai travaillé avec la France, j'ai tout donné, tout perdu et je n'ai rien reçu".
Harki de la cité Brogilum, située dans un bois, près du bourg provençal de Fuveau, Abdallah Allioui, 69 ans, amer, n'attend plus grand chose de l'Etat français, à la veille de l'examen au Sénat du projet de loi en faveur des rapatriés. Arrivé en 1971 dans cette ville de plus de 7.000 habitants, l'un des six sites historiques d'accueil des harkis dans les Bouches-du-Rhône, M. Allioui a connu les baraques en bois posées sur le flanc d'une colline boisée, hâtivement construites pour les harkis qui fuyaient l'Algérie en 1962 et l'époque des "gens qui voulaient nous trancher la gorge". En 1975-76, ces bicoques accueillant 32 familles ont été rasées et remplacées par un lotissement en dur. Les maisons, collées les unes aux autres, pourraient paraître presque coquettes si ce n'étaient les multiples vices de fabrication: l'absence de vide sanitaire laisse remonter l'humidité, les toits plats sont sujets aux infiltrations quand ils ne s'effritent pas, les espaces sont souvent inadaptés pour des familles très nombreuses, et la promiscuité est de mise avec les voisins. "On nous a mis dans la colline, comme des sauvages. Maintenant on est vieux, on nous a oubliés", lâche Abdallah Allioui, qui vit en compagnie de deux de ses dix enfants, et avec 470 euros de pension.


 

"rien n'a changé"


Comme d'autres harkis, maintenant à la retraite, il n'espère plus grand chose. Et si on l'aidait à accéder à la propriété, comme cela a été fait pour d'autres groupes de harkis, il n'achèterait pas ce logement, qu'il peine à appeler une "maison". "Tout le monde est venu ici: la Croix-Rouge, Kouchner, Tapie, Madelin, Alliot-Marie. Ils sont tous repartis et rien n'a changé", s'exclame, sous le couvert de l'anonymat, Ahmed, 37 ans, qui a grandi là et a participé la rage au ventre à toutes les actions de protestation dans les années 80. Sa mère réside toujours dans la cité, mais pour lui "pas question de revenir habiter ici". Si lui reconnaît avoir "jeté l'éponge", d'autres enfants de harkis, la "deuxième génération", mènent le combat pour la reconnaissance des services rendus par leur parents et les souffrances endurées, dont ils sont les témoins vivants. Les conditions précaires de vie mais aussi de scolarisation de ces enfants-là en ont fait une génération d'adultes particulièrement touchée par le chômage. Vice-président de l'association AJIR (association justice information réparation) pour les harkis, Saïd Merabti tente de faire entendre les revendications de sa communauté. Pour lui, le texte voté par l'Assemblée en juin est "décevant pour les enfants de la deuxième génération", dont certains sont nés en Algérie et ont dû fuir avec leur parents. AJIR demande qu'ils aient droit, au même titre que leur parents, à une indemnité de réparation.