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La volonté de
Paris de ne rien faire qui puisse froisser l'extrême susceptibilité
d'Alger aura en tout cas permis à Jean-Marie Le Pen
d'annoncer la nouvelle sur Radio Monte Carlo. Le leader
du Front National a exprimé sa colère de voir le responsable
algérien soigné en France, rappelant les récentes
déclarations d'Abdelaziz Bouteflika le 17 avril 2006 à
Contantine qui a dénoncé un " génocide
de l'identité » algérienne lors de la colonisation
française". « Je trouve scandaleux
que monsieur Bouteflika se permette de dire cela publiquement et
le lendemain d'être chez nous pour se faire soigner. Je ne
comprends pas qu'il vienne se faire soigner chez les abominables
colonialistes que nous sommes ».
Deux députés de l'UMP, Nicolas Dupont-Aignan
et Lionnel Lucas, ont réagis , pour l'élu
des Alpes-Maritimes, Lionnel Lucas a jugé «
indécent » le séjour en France du chef
de l'Etat algérien. Philippe de Villiers
s'est joint en stigmatisant la « lâcheté
» du gouvernement français qui s'est «
refusé à commenter » la relance de
la polémique sur la colonisation de Bouteflika.
A cinq mois d'intervalle, la maladie du président algérien
est à nouveau gérée de la même manière
par Alger et Paris : dans une totale absence de transparence et
avec une langue de bois qui ne trompe personne. « Opération
d'un ulcère hémorragique » au niveau de l'estomac,avait
soutenu Alger au cours de la première hospitalisation de
Bouteflika au Val-de-Grâce, où il avait été
transporté dans la nuit dans un état dramatique du
26 novembre 2005. Il n'était rentré en Algérie
que cinq semaines plus tard. Et alors qu'Alger s'évertuait
à dédramatiser son état, toutes les sources
crédibles s'accordaient sur un diagnostic : cancer de l'estomac.
L'allégement très sensible de ses activités
et de rarissimes apparitions pendant plusieurs semaines n'avaient
fait que confirmer la gravité de son état.
C'est en faisant une tournée « dans l'Algérie
profonde », avant de se lancer dans une nouvelle surenchère
contre la France le lundi 17 avril 2006 à Constantine très
Virulente. C'était à peine quelques jours après
la visite à Alger du chef de la diplomatie française
Philippe Douste Blazy qui aura servi à une chose : montrer
que le traité d'amitié avec Paris, prévu en
principe « avant fin 2005 », n'était
plus d'actualité pour Bouteflika. « La
colonisation a réalisé un génocide de notre
identité, de notre histoire, de notre langue, de nos traditions
(...). Nous ne savons plus si nous sommes des Amazighs (Berbères,
ndlr), des Arabes, des Européens ou des Français»,
a-t-il alors affirmé.
La virulence de cette déclaration semble, à elle seule,
démentir que la venue à Paris du chef de l'Etat algérien
était « prévue de longue date ». On le
voit mal en effet s'en prendre aussi violemment à la France
cinq jours avant de venir y effectuer un « contrôle
médical », au risque d'être moqué par
des Algériens incrédules face à une telle contradiction.
Les chanceliers occidentaux qui suivent de très près
le développement de la situation en Algérie, notamment
après la maladie du président Bouteflika, ont été
surpris par ses déclarations prononcées lors de sa
sortie algéroise le lundi 3 avril dernier pour visiter les
travaux de la nouvelle aérogare d’Alger. Choisissant
le deuxième anniversaire de sa réélection pour
un deuxième mandat, il s’est attaqué à
la mauvaise gestion dans bien de secteurs d’activités
économiques ainsi que les lenteurs bureaucratiques qui freinent
les investissements étrangers ; et, qui, selon lui,
font perdre au pays des milliards de $. Bouteflika, en généralisant
de la sorte sans montrer du doigt les responsables, brouille plus
les cartes, surtout lorsqu’on apprend de sources concordantes
algériennes que ceux qui commencent à tirer les ficelles
de nouveau l’ont presque obligé à se rendre
à Khartoum pour inaugurer le sommet arabe. En reconnaissant
que l’Algérie est en panne, malgré les revenus
exorbitants et les réserves considérables en devises,
le chef de l’Etat algérien aurait voulu se venger de
ceux qui ont fait tomber à l’eau tous ces projets aussi
bien politiques que socio-économiques. Il s’agit de
son projet de « réconciliation nationale », comme
son pari sur son « plan complémentaire de soutien à
la croissance (PCSC) auquel il avait consacré 55 milliards
de $, s’étalant de 2004 à 2009, visant à
relancer la croissance par la dépense publique.
Ceux qui connaissent de près le président algérien
laissent comprendre qu’il faut s’attendre à beaucoup
de surprises au fur et à mesure que l’on se
rapproche du choix du successeur. Les noms mis en circulation
tels que l’actuel Premier ministre, Ahmed Ouyahia, ne semblent
pas le convaincre de se lancer dans des attaques personnelles. Car,
en fin de compte, le ministre des Affaires étrangères
de Houari Boumediene est aussi de la maison. Il connaît parfaitement
ses méthodes, ses jeux et ses critères de choix adoptés
aux circonstances.
Le report aux calendes grecques de la signature du «
Traité de paix et d’amitié » avec
la France, confirmé par l’échec de la visite
du ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy
le 9 & 10 avril 2006, a été un revers pour Bouteflika.
Même si certaines sources à Alger tiennent à
souligner qu’il n’avait jamais eu l’intention
de le concrétiser du fait d’un deal négocié
avec les Etats-Unis. La preuve, le rapprochement significatif
à tous les niveaux avec Washington. Mais, en tout état
de cause, le report répété sans parler d’annulation
de ce traité montre à quel point il est difficile
de prendre des grandes décisions en ce moment. Les tiraillements
qui avaient précédé l’arrivée
du président russe, Vladimir Poutine, et la signature des
accords militaires reflètent la même situation. Car,
chaque aile du pouvoir tente de défendre ses intérêts
tout en sabotant ceux de l’autre.
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