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GUERRE D'ALGÉRIE le projet de loi arrive au Sénat
 
     
 
 

Le Sénat examinera, le 16 décembre 2004, le projet de loi traitant de la situation des harkis et des rapatriés d'Afrique du Nord, texte déjà approuvé par les députés le 11 juin 2004. C'est l'aboutissement d'un long processus, promis aux intéressés par Jacques Chirac pendant la dernière campagne présidentielle et qui tend à solder, matériellement et moralement, un contentieux issu de l'exode de 1962.
«Le gouvernement Jospin avait laissé le dossier en jachère, observe Hamlaoui Mekachera, ministre des Anciens Combattants, qui défend le texte. Pendant cinq ans, il n'y a eu que poudre aux yeux : un comité de suivi pour les harkis et une commission de consultation pour les pieds noirs. Or il n'y a rien eu à consulter, faute d'un projet, et il n'y a rien eu à suivre non plus.» L'affaire a été relancée dès 2002, avec la création de la mission interministérielle aux rapatriés, présidée par Marc Dubourdieu, puis du Haut Conseil aux Rapatriés.
En octobre 2003, le rapport commandé par Jean-Pierre Raffarin à Michel Diefenbacher, député UMP du Lot-et-Garonne, concluait le travail préparatoire. L'intitulé de ce rapport résume tout le projet législatif actuel : «Parachever l'effort de solidarité nationale envers les rapatriés, promouvoir l'oeuvre collective de la France d'outre-mer».

Le devoir de mémoire a fait l'objet, à l'Assemblée, d'un amendement majeur. L'article Ier, déjà très explicite sur la reconnaissance de l'oeuvre des anciennes communautés d'Afrique du Nord, grave dans le marbre un constat que beaucoup désespéraient de lire jamais : «La nation associe les populations civiles de toutes confessions, harkis, pieds-noirs, victimes des massacres perpétrés durant la guerre d'Algérie ainsi que ceux commis après le 19 mars 1962, en violation des accords d'Évian, à l'hommage pour les combattants morts pour la France en Afrique du Nord, rendu le 5 décembre lors de la journée nationale décrétée en 2003.»
Si les sénateurs approuvent ce texte, la loi reconnaîtra pour la première fois que la guerre d'Algérie ne s'est pas arrêtée au jour du cessez-le-feu officiel. Et que la commémoration du 19 mars, chère à la Fnaca et à nombre de municipalités – essentiellement – de gauche, est inappropriée. Le ministre insiste sur la date du 5 décembre, arrêtée l'an dernier.
Mais le problème risque d'attiser encore longtemps les passions. En réunion du Conseil de Paris, à la mi-novembre, l'UMP Pierre Charon a interpellé le maire socialiste, Bertrand Delanoë, pour protester contre le fait qu'il n'ait pas fait pavoiser, le 25 septembre, nouvelle date nationale d'hommage aux harkis. C'est une adjointe au maire qui s'est chargée de la réponse : Bertrand Delanoë était tout de même présent aux Invalides pour la cérémonie officielle.
Dans ce contexte, l'affaire des «disparus» de l'après-19 mars, longtemps occultée, reprend de l'ampleur. Les familles de plusieurs milliers de Français d'Algérie enlevés – et pour la plupart assassinés – veulent aujourd'hui connaître toute la vérité. Le Cercle algérianiste y a consacré un important colloque, à Perpignan, en octobre. «La douleur ne pourra pas s'apaiser, observe son président, Thierry Rolando. Mais nous demandons aux autorités de l'État de cesser de jeter le voile sur ce drame, et que l'Algérie reconnaisse aussi sa responsabilité.»
«Si on peut en parler aujourd'hui, c'est parce que le gouvernement a fait en sorte que le débat s'ouvre, répond Marc Dubourdieu. Nous avons rendu public le rapport établi par la Croix-Rouge en 1962-1963. Nous avons ouvert les archives des Affaires étrangères aux familles, sur dérogation. Le général Faivre rédige un rapport, qu'il devrait remettre dans quelques mois.»
Un autre amendement prévoit la création d'une fondation, chargée de faire la lumière sur l'ensemble de la guerre d'Algérie, dont l'histoire a été tant falsifiée. Elle regroupera historiens, témoins et acteurs, qui disposeront du concours de l'État et de moyens privés. A terme, on n'exclut pas d'obtenir un recentrage de l'idéologie qui sous-tend l'enseignement de cette période dans les manuels et les programmes scolaires.
Le projet de loi comporte aussi un important volet financier (600 millions d'euros), qui répare les dernières injustices envers les rapatriés. Les harkis obtiennent une allocation de reconnaissance portée de 1 830 à 2 800 € par an (ou maintenue à son niveau mais avec versement d'un capital de 20 000 €, ou encore remplacée par un capital de 30 000 €). Le dispositif est complété par une aide au logement. Le gouvernement a, par ailleurs, sensibilisé les préfets aux problèmes d'emploi des enfants de harkis.
http://www.lefigaro.fr/politique/20041211.FIG0132.html