Sarkozy : Discours de Constantine 5 décembre 2007 " le système colonial était injuste par nature et le système colonial ne pouvait être vécu autrement que comme une entreprise d'asservissement et d'exploitation."

 

Je sais, Cher Abdelaziz, les souffrances du passé, je sais les blessures profondes que les tragédies de l'Histoire ont laissées dans l'âme du peuple algérien.
Et dans cette ville de Constantine je n'ignore nullement que les universités portent les noms de grands résistants qui furent des héros de la cause algérienne.
Dans cette ville, que je n'ai pas choisie par hasard, les pierres se souviennent encore de ce jour de 1837 où un peuple libre et fier, exténué après avoir résisté jusqu'à l'extrême limite de ses forces, fut contraint de renoncer à sa liberté.
Les pierres de Constantine se souviennent encore de cette journée terrible du 20 août 1955 où chacun fit couler ici le sang, pour la cause qui lui semblait la plus juste et la plus légitime. Ce n'est pas parce que 1955 est l'année de ma naissance que je dois ignorer cette bataille et cette date.
Le déferlement de violence, le déchaînement de haine qui, ce jour-là, submergea Constantine et toute sa région et tua tant d'innocents étaient le produit de l'injustice que depuis plus de cent ans le système colonial avait infligée au peuple algérien.
L'injustice attise toujours la violence et la haine. Beaucoup de ceux qui étaient venus s'installer en Algérie, je veux vous le dire, étaient de bonne volonté et de bonne foi. Ils étaient venus pour travailler et pour construire, sans l'intention d'asservir, ni d'exploiter personne. Mais le système colonial était injuste par nature et le système colonial ne pouvait être vécu autrement que comme une entreprise d'asservissement et d'exploitation.
De part et d'autre, -et c'est mon devoir de Président de la République de le dire-, de part et d'autre, il y a eu des douleurs, il y a eu des souffrances, il y a eu des peines. Ces douleurs, ces souffrances et ces peines, nul en Algérie ni en France ne les a oubliées. Je n'oublie ni ceux qui sont tombés les armes à la main pour que le peuple algérien soit de nouveau un peuple libre, je n'oublie ni les victimes innocentes d'une répression aveugle et brutale, ni ceux ont été tués dans les attentats et qui n'avaient jamais fait de mal à personne, ni ceux qui ont dû tout abandonner : le fruit d'une vie de travail, la terre qu'ils aimaient, la tombe de leurs parents, les lieux familiers de leur enfance.
Mais, jeunes d'Algérie, c'est en regardant ensemble, Algériens et Français, vers l'avenir, que nous serons fidèles aux souvenirs de nos morts, qu'ils soient Algériens ou Français.