Pierre Joxe : j’étais contre les lois d’amnistie en 1982 de François Mitterrand

 
       
 
 

Ancien ministre et membre du Conseil constitutionnel, Pierre Joxe, récemment élu à la présidence de l’Association France-Algérie, présentait les ambitions de l’association qu’il entend sortir d’une période de somnolence pendant laquelle, la vieille dame ne fonctionnait plus guère que par « communiqués ».
- 10 avril 2007 - - Pierre Joxe : France Algérie doit se tourner vers l’avenir, mais il ne faut pas oublier qu’elle a été fondée en 1963 par des gens de ma génération. Madame Germaine Tillon, qui va fêter son centenaire dans quelques semaines, en est encore aujourd’hui la présidente d’honneur.
Pour construire l’avenir, pour mieux asseoir une coopération dense, la jeunesse a besoin de connaître l’histoire, de savoir ce qui s’est passé entre les deux pays.
Revient-il au législateur et au politique de dire comment l’histoire doit être enseignée ?
Pierre Joxe : Aussitôt la loi du 23 février 2005 adoptée, l’association France Algérie a pris une position, signée de son président de l’époque Bernard Stasi, en même temps que moi, condamnant absolument son article 4, sur les « bienfaits de la colonisation ». Depuis, les idées ont évolué, puisque le gouvernement, qui aurait pu s’opposer à ce texte à l’Assemblée, ne l’a pas fait, le président de la République, qui aurait pu demander une deuxième délibération, ne l’a pas fait, il a demandé quand même au Conseil constitutionnel de déclasser le texte, plus précisément un alinéa de l’article 4, celui qui, à certains égards, est offensant pour la vérité, ce que nous avons fait. Nous n’étions interrogés que sur cet alinéa. A partir du moment où ce n’était plus du domaine législatif, le gouvernement l’a abrogé. Il a été effacé juridiquement. Politiquement, nous savons bien qu’il y a des gens qui pensent toujours la même chose.
Les lois d’amnistie n’ont-elles pas constitué un frein à la reconnaissance de crimes commis pendant la guerre de libération de l’Algérie ?
Pierre Joxe : Vous touchez un point sensible, j’étais contre les lois d’amnistie, j’ai eu aussi un différend avec François Mitterrand lorsqu’il y a eu un projet de loi de réhabilitation des généraux fascistes, factieux, de l’OAS. Cela a été une crise assez forte à tel point que la loi n’a jamais été mise au vote, Mitterrand l’a fait passer par un système dit du 49-3. L’article 49, paragraphe 3 de la Constitution, permet de considérer une loi comme votée s’il n’y a pas une motion de censure contre le gouvernement. Je considérais que dire qu’on réhabilitait des généraux qui avaient tourné les armes et qui avaient cherché à tourner les hommes contre la République parce qu’ils n’étaient pas d’accord avec la politique du général de Gaulle, c’était inacceptable.