"Ce film n'a pas vocation à être un film historique, a déclaré le ministre, reçu dimanche sur Europe 1" . C'est une fiction qui aborde un épisode de souffrance intense dans les relations franco-algériennes. Est-ce que tous les films américains sur la guerre du Vietnam respectent la vérité historique absolument ? Est-ce que tous les films américains sur la guerre en Irak respectent la vérité historique exactement ? Non ! Ce sont des films, il y a un élément romanesque, une simplification, un débordement qu'apporte le romanesque."
Mitterrand appelle à ne pas manifester
Frédéric Mitterrand est soucieux d'apaiser les esprits, alors que certains mouvements appellent à manifester en bas des marches du Palais des Festivals, à Cannes, le jour de la projection. "Les harkis et les rapatriés savent le respect que j'ai pour eux," a-t-il ajouté, en incitant les personnes heurtées (par un film qu'ils n'ont pas encore vu, ndlr) à ne pas manifester. "Ce serait contre-productif, a souligné Frédéric Mitterrand. Ça permet à toute sorte de nervis d'extrême droite ou d'extrême gauche de pêcher en eaux troubles.
Il ne faut pas faire ça." En revanche, la cérémonie qui se déroulera le matin du 21 mai devant le monument aux morts de Cannes reçoit tous les encouragements du ministre de la Culture.
Frédéric Mitterrand fut plus embarrassé quand il s'est agi de justifier l'initiative de Hubert Falco (secrétaire d'État à la Défense), son collègue au gouvernement, qui a fait établir un rapport sur le scénario du film Hors la loi par ses historiens militaires. En effet, il n'existe aucune procédure en France qui autorise l'armée à se procurer - on ne sait comment - un scénario - qui plus est pas forcément définitif - afin d'y appliquer une sorte de visa. Mitterrand, en défenseur de la liberté des créateurs, a donc minimisé l'action du Secrétaire d'État à la Défense : " Il a simplement fait un accusé de réception ", a déclaré Frédéric Mitterrand.
La guerre d'Algérie a connu des films plus durs
Le rapport du service historique de la Défense et peut témoigner qu'il s'agit bien plus que d'un "accusé de réception". C'est un document sévère envers Rachid Bouchareb, précis, minutieux, tatillon, qui décortique chaque page du scénario afin d'y traquer les "erreurs" et "anachronismes".
Mais pour ceux qui s'intéressent un peu au cinéma, les polémiques cannoises sont fréquentes. L'an passé, le film Le Prophète avait été traité de film anti-corse. Puis, à sa sortie, cette polémique s'était évanouie... "Concernant la guerre d'Algérie, des films bien plus durs que celui de Bouchareb sont sortis sur les écrans ces dernières années, comme Mon colonel , en 2006, sur la torture, ou encore Ennemi intime, en 2007, avec Benoît Magimel", relève-t-on au ministère de la Culture. D'autant plus que Hors la loi , selon le critique Laurent Weil (le seul à l'avoir vu) , traite essentiellement des porteurs de valises du FLN et évoque plutôt les dissensions entre les mouvements indépendantistes algériens, sujet très peu abordé à ce jour...
Source : http://www.lepoint.fr/actualites-medias/2010-05-18/polemique-bouchareb-mitterrand-defend-le-romanesque-de-hors-la-loi/1253/0/456160
Emmanuel Berretta |