EL
WATAN Edition du 16 janvier 2005
Ahmed Djekhnoun. Directeur de l’Etablissement des pompes funèbres
et cimetières de la ville d'Alger « Un secteur longtemps
délaissé »
Ahmed Djekhnoun est directeur général de l’Etablissement
de gestion des pompes funèbres et des cimetières (EGPFC)
depuis une année et demie. L’EGPFC a été
créé en 1995 par arrêté du wali d’Alger.
Il y a une confusion dans la gestion des cimetières...
Partagez-vous cet avis ?
Je pense que le moment est venu d’éclairer la situation.
Le territoire de la wilaya d’Alger renferme en tout 141 cimetières
dont 106 cimetières musulmans, 34 chrétiens et 1 israélite.
Initialement, ces cimetières étaient gérés
par le Conseil populaire de la ville d’Alger (ex-CPVA). Après
la dissolution de cet organisme, il y a eu la création d’un
autre EPIC, à savoir, l’EGPFC. L’établissement
dispose d’un plan de charge de 17 cimetières, dont
11 musulmans, 5 chrétiens et 1 israélite.
Pourquoi votre plan de charge ne couvre que 17 cimetières
sur 141 ?
Les 17 cimetières que nous gérons représentent
plus de 50% de la superficie totale de l’ensemble des cimetières
d’Alger. Nous avons la charge des plus importants et des plus
vieux cimetières d’Alger, notamment El Alia qui est
un cimetières national (80 ha), les cimetières d’El
Kettar (14 ha), de Garidi (17 ha) et de Ben Omar (8,50 ha). Concernant
les plus importants cimetières chrétiens, on peut
citer Bologhine (18 ha) et celui du boulevard des Martyrs (11,75
ha). Le wali d’Alger a pris récemment la décision
d’affecter l’ensemble des cimetières chrétiens
à notre établissement. Ainsi, depuis septembre 2004,
notre entreprise gère quelque 56 cimetières.
La plupart des cimetières d’Alger sont dans un
état de désolation. Qu’en pensez-vous ?
Etant très franc dans ce domaine, j’approuve votre
remarque. C’est un secteur quelque peu délaissé,
conséquence du peu d’intérêt qui lui a
été accordé jusque-là. Il y a peut-être
eu des négligences. Les gens croyaient que les cimetières
sont tout simplement des lieux où on enterre les morts, alors
que c’est toute une gestion, toute une organisation et toute
une réglementation qu’on doit faire respecter. Nous
sommes d’abord des musulmans et notre religion considère
les cimetières comme des lieux sacrés pour le repos
éternel des morts. Comme tout le monde le sait, on est passé
par une période assez difficile pendant laquelle personne
n’osait s’y aventurer.
Les cimetières d’Alger sont quasiment saturés.
Que peut-on faire pour remédier à cette situation
?
Les vieux cimetières d’Alger sont saturés, certes.
Il s’agit notamment des cimetières d’El Kettar,
de Garidi, d’El Madania... Le wali d’Alger a pris des
initiatives et c’est dans ce cadre qu’il nous a confié
la gestion des cimetières chrétiens. 7 nouveaux cimetières
musulmans vont être créés. Les chantiers sont
en cours, notamment aux Grands Vents et à Birkhadem. Pour
les autres sites, à savoir Gué de Constantine, Bourouba,
El Harrach et les Eucalyptus, les études sont d’ores
et déjà faites, les appels d’offres lancés
et il ne nous reste que le choix des entreprises pour démarrer
les travaux. Un autre projet d’extension concerne quatre cimetières
: El Madania, Garidi, Aïn Benian et El Kettar. Une enveloppe
de l’ordre de 228 millions de dinars est destinée à
la réalisation des 7 cimetières et à l’extension
des 4 autres. Par ailleurs, une autre enveloppe sera débloquée
pour le financement des travaux de réaménagement qui
seront engagés dans 17 cimetières.
Les sépultures chrétiennes ont-elles été
réellement profanées ?
Rien n’a été épargné pendant la
décennie du terrorisme. Ni les cimetières chrétiens
ni les cimetières musulmans. Il y a eu des profanations,
certes. Les raisons de ces violations restent, toutefois, inexpliquées.
Néanmoins, depuis quatre ans, on n’a pas enregistré
de profanations ni au niveau des cimetières chrétiens
ni au niveau des cimetières musulmans. Pourquoi ? Parce que
tout simplement, on a pris en charge de façon sérieuse
la gestion de ces cimetières. Il faut noter aussi que les
inondations de Bab El Oued et le tremblement de terre de mai 2003
ont partiellement détruit certains cimetières.
Que pensez-vous du plan annoncé par les autorités
françaises concernant le regroupement des sépultures
?
C’est un dossier important qui n’est pas pris en charge
par la wilaya d’Alger. Un dossier est ouvert par les autorités
des deux rives. Il y a des spécialistes de part et d’autre
pour le regroupement des cimetières chrétiens. Je
pense qu’il y a des raisons valables qui ont poussé
les responsables chrétiens à réfléchir
de la sorte. Ils ont constaté que certains petits cimetières,
situés dans des endroits reculés, sont depuis longtemps
négligés. Le regroupement de ces sépultures
permettrait de mieux les gérer. Nous avons recensé
560 cimetières chrétiens en Algérie. 90% des
personnes qui y sont enterrées sont de nationalité
française. La République française a le droit
de prendre les mesures qui s’imposent en collaboration avec
l’Algérie pour que ce dossier soit pris en charge.
Il y a une bonne volonté de la part de l’Algérie
et de la France pour régler ce problème. Une association
pour la préservation des cimetières chrétiens
commence à bouger. Il y a aussi la Fondation France-Maghreb
qui a pris contact avec moi. Il y a des échanges de correspondances.
Nous sommes en phase de concrétisation de certaines actions
que nous allons mener ensemble.
A. Benchabane
Olivia Marsaud
IN http://www.elwatan.com/2005-01-16/2005-01-16-11791
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