Le Centre d'Etudes Scientifiques appliquées à l'hydraulique de Clairbois. (ALGER)
 
   
 
     
 
Dans le courant de l'année 1951, la mise en service du Centre d'Etudes scientifiques de Clairbois situé sur la commune de Birmandreis en banlieue d'Alger, permit le regroupement indispensable de spécialistes qui poursuivaient un même but : connaître tous les aspects du problème de l'eau en Algérie et appliquer ces connaissances aux travaux de recherche, de mise à disposition et d'utilisation.
 
     
 
 
Dans des installations modernes conçues pour fonctionner avec cohérence, le Domaine de CLAIRBOIS réunissait des spécialistes de l'Hydrologie et de la Climatologie, de la Géologie, de la Chimie, de la Pédologie ( études du sol), de l'Agrologie, de la Physique et de la mécanique des sols. En liaison étroite avec la Météorologie Nationale, la Section Climatologie et Hydrologie rassemblait les chiffres et indications fournis par les postes pluviométriques quadrillant toute l'Algérie jusqu'au massif du Hoggar. De ces précipitations atmosphériques, " l'eau qui tombe ", une partie ruisselle, une autre s'infiltre, une dernière enfin s'évapore. La section s'attachait à suivre le sort de ces fractions diverses. Une quarantaine de stations équipées d'enregistreurs fournissaient ainsi les chiffres des débits des oueds et rivières. Elles furent souvent détruites par les terroristes à partir de 1954. Ces données permettant de calculer les crues servaient à établir les projets de dimensionnement d'un pont, d'un barrage ou d'un simple exutoire. En liaison avec la section Chimie, la composition des débits solides de l'érosion pouvait être déterminée. La section Hydrologie et Climatologie répertoriait aussi tous les points d'eau, naturels ou artificiels, qui étaient fichés avec toutes leurs caractéristiques. Elle ajouta à ses activités l'étude des énergies solaire et éolienne et apporta son concours aux études concernant la pluie provoquée qui furent particulièrement poussées en Algérie.
A la section géologie, avec la Géotechnique et l'Hydrogéologie, revenaient les études concernant l'eau ruisselée. Pour la retenir et l'accumuler en barrages des études de sols, résistance, étanchéité, étaient entreprises et traduites en cartes, graphiques etc.. Pour les sources, le géologue avait à préconiser le mode de captage, la ré-alimentation de la nappe et l'utilisation envisagée. Tenant compte des dangers de pollutions détectés, il pouvait déterminer l'aire de protection de chaque point d'eau.
Dans la recherche d'eau profonde, des bilans hydrologiques étaient réalisés par forages de reconnaissances parfois convertis en forages d'exploitation. La mise en valeur des régions sahariennes en fut dépendante. Cette section, la plus importante en effectifs de CLAIRBOIS, confiait à chaque géologue un secteur d'études correspondant à un ou plusieurs bassins versants. De retour à Alger, le géologue complétait ses études de terrain avec l'aide des laboratoires et des ateliers spécialisés.
 
 
 
La section Chimie recherchait les caractéristiques de l'eau pour en déduire qualités, propriétés et utilisation future. Pour les eaux d'arrosage et d'irrigations la collaboration du service de Pédologie et d'Agrologie s'avérait indispensable pour éviter de stériliser de longues années des sols aménagés souvent à grands frais. Cette section procédait à l'analyse systématique de chaque nouveau point d'eau répertorié et au contrôle régulier de certains oueds. Examens comparatifs des analyses et leurs interprétations aidaient le géologue à déterminer les cheminements ou l'origine de résurgence des eaux. Certains phénomènes de glissements de terrains purent ainsi être expliqués et combattus. Le dessalement à l'aide des résines synthétiques " échangeuses d'ions " était particulièrement étudié, en raison de l'importance des zones à eaux saumâtres.
 
         
   
         
   
Barrage du Hamis
   
 
 
L'étude du sol, support de la culture, était l'objectif de la section de Pédologie. Les pédologues du Centre prospectaient donc avant d’étudier les sols destinés à être irrigués. Toutes analyses faîtes, une carte pouvait être établie renseignant sur les différents types de sols délimités et leurs caractéristiques. Un inventaire des sols agricoles et non agricoles de l'Algérie fut ainsi crée par prospection systématique.
Ultime étape du " cycle d'études de l'eau " la section Agrologie, renseignée par le travail des autres sections, pouvait choisir les cultures et les façons culturales les mieux adaptées à chaque région en tenant compte des besoins et habitudes de la population, des possibilités de main d'oeuvre, des débouchés économiques... Les projets de culture réalisés, l'agrologue surveillait les transformations des sols cultivés, le développement des plantations.
Une expérimentation préalable se faisait pour les sols à grandes cultures avec les Services de l'Agriculture : plaine du Cheliff, Hautes plaines oranaises etc... Les cultures résistantes au sel : riz, coton, plantes textiles y furent spécialement étudiées.
Enfin la Section de Physique et Mécanique du sol constituait une aide générale et complémentaire aux autres disciplines.
Au géotechnicien, par exemple, elle apportait le résultat de ses études sur la propriété des roches et des matériaux prévus pour des ouvrages projetés et l'hydrogéologue pouvait la consulter pour déterminer la plasticité ou la perméabilité des gisements étudiés. Ses divers laboratoires étaient en contact permanent avec ceux de l'Université, ceux du Bureau de Recherches Minières en Algérie, des sociétés de prospection pétrolière ou de la Carte géologique. Clairbois se tenait informé des progrès de toutes les disciplines et son groupement de scientifiques avait peu d'équivalent au monde. De nombreux stagiaires, venus de tous horizons, y furent formés.
La revue du C.E.S., " Terres et Eaux ", et son supplément scientifique parut trimestriellement à partir de 1949. Ses articles, avec résumés traduits en anglais et en espagnol, rendaient compte de toutes les réalisations et observations faites en Algérie. Une dizaine de pages étaient consacrée aux publications éditées dans le monde entier concernant l'hydraulique et l'équipement rural. Ajoutons aussi que par sa diffusion mondiale " Terres et Eaux " ouvrait le chemin de l'Entreprise française à l'étranger. Pour étudier les problèmes, vastes et variés, posés par l'eau, précieuse " matière première ", l'étroite collaboration entre les sciences de la nature s'imposait. Cela fut réalisé au Domaine de Clairbois grâce à M a r c e l Gautier, l'instigateur, réalisateur et animateur de ce Service exemplaire.
John Franklin
Bibliographie

Collection : Revue " Terres et Eaux ". En particulier le n°30 (1er trimestre 1957.