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" Comme à
l'accoutumée, le matin du 5 juillet 1962, J'entrepris ma
tournée de ramassage... Il était environ 11 heures,
j'étais sur le chemin du retour aux buanderies. Arrivé
devant la morgue, je n'en crus pas mes yeux devant le carnage. Là,
devant moi, une camionnette civile était chargée de
corps d'Européens sans vie, empilés les uns sur les
autres et ramassés en ville quelque temps auparavant. "
Ainsi témoigne Antoine Romero. A Oran, le 5 juillet 1962,
jour choisi pour célébrer dans la liesse l'indépendance
de l'Algérie, des centaines d'Européens furent enlevés
et tués. Et les troupes françaises, encore présentes
dans la ville, sont restées l'arme au pied. Comme le leur
avait ordonné le président De Gaulle. Cette journée
poussera à l'exil des milliers de gens. Pourtant, pendant
des décennies, l'événement sera occulté
soigneusement des deux côtés de la Méditerranée.
S'appuyant sur des archives militaires inédites, des documents
internes de la Croix-Rouge et de nombreux récits de survivants,
Jean Monneret révèle tous les tenants et les aboutissants
de cette tragédie dissimulée.
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Sommaire de l'ouvrage
de
jean Monneret
Les enlèvements
Oran
et l'Oranie en 1962
Le
début des enlèvements
Le
passage à l'indépendance
Le
matin du 5 juillet
Il
est midi ce 5 juillet 1962
L'après-midi
du 5 juillet |
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Les fantômes du massacre d'Oran
Voilà un livre qui ne va
guère dans le sens de l'Histoire. Alors qu'on ne cesse aujourd'hui
de pointer du doigt les exactions françaises et la torture
en Algérie, l'historien Jean Monneret lève le voile
sur le massacre des pieds-noirs, le 5 juillet 1962 à Oran
: 365 Français tués en un seul jour par des policiers
algériens et des membres de l'ALN. Chez les pieds-noirs,
bien sûr, on n'a rien oublié, mais qui d'autre s'en
souvient ? « Les morts algériens du 17 octobre 1961
ont eu droit à une plaque commémorative et plusieurs
films. Les morts d'Oran n'ont eu droit à rien. »
Pour tout massacre, il faut un terrain propice. Depuis le cessez-le-feu
du 19 mars 1962, le FLN kidnappait des Européens - plus de
3 000 en six mois - pour accélérer leur exode et intensifier
sa lutte contre l'OAS, dont le bastion est Oran, au bord de la guerre
civile. Il suffit d'un rien. D'une manifestation algérienne,
par exemple, qui converge vers le centre-ville, au matin du 5 juillet.
Quatre jours plus tôt, l'Algérie a dit oui, par référendum,
à son indépendance. La manifestation dégénère.
Coups de feu, riposte. La chasse au pied-noir est ouverte. Ils sont
près de 100 000 à Oran. Les troupes françaises
sont encore présentes, mais elles restent consignées,
sur ordre de leur commandant, le général Katz, qui
va laisser faire, fidèle à la position du général
de Gaulle : « Si les gens s'entre-massacrent après
l'indépendance, ce sera l'affaire des nouvelles autorités.
» Entendez, des autorités algériennes. Compte
tenu de la double responsabilité des Etats français
et algérien, les pieds-noirs d'Oran peuvent-ils espérer
avoir une place dans le grand livre de la mémoire ? Il est
permis d'en douter
Par François-Guillaume Lorrain
IN Le point 02/03/06 - N°1746
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