Relecture : la vraie Afrique des pionniers
On écrit beaucoup sur l'Afrique et nos intellos
ont acquis une certaine virtuosité dans la désinformation
sur ce malheureux continent, enseveli sous la prétentieuse
sottise de nos élites depuis qu'il a été «
décolonisé », ou , pour parler en français
ordinaire, abandonné. Cependant, quelques
esprits libres ont aussi raconté leur Afrique, celle qu'ils
ont vécue, aimée et détestée, épousée
et répudiée. Car là-bas tout est compliqué
et excessif, d'où des récits irremplaçables
et bien souvent ignorés. Un de ces témoignages possède
une valeur unique car il résulte de la rencontre d'un véritable
écrivain, à la plume alerte et vivante, et d'un personnage
extraordinaire, aventurier et colon ordinaire d'un des pays les
plus mal connus du continent noir, le Gabon. C'est un ouvrage vieux
de
quelques années déjà, qui a obtenu en 1985
le prix des Libraires, signé de Christian Dedet, retraçant
la vie africaine de Jean Michonet et intitulé « La
Mémoire du fleuve ». Jean Michonet est né au
Gabon en 1932 d'un père français forestier à
Fernan Vaz et d'une mère métisse, encore toute imprégnée
des traditions de l'ethnie des Myéné dont elle est
issue par sa mère. Orphelin de mère tout
enfant, il se retrouve seul à quatorze ans, son père
tuberculeux étant mort en ne laissant que des dettes et trois
enfants en bas age. C'est un fils de la brousse, élevé
dans la forêt dont il connaît déjà tous
les secrets, dont il parle les dialectes, ceux des hommes comme
ceux des animaux.
A quinze ans, chef d'une véritable expédition, meneur
d'hommes né - alors qu'il vient à peine d'échapper
à l'orphelinat ! - on le voit traversant un pays totalement
inexploré, déjouant tous les dangers, pour «
recruter ». Il s'agit d'aller chercher dans les tribus des
travailleurs pour les exploitations forestières. Ces emplois
très appréciés des jeunes étaient pour
eux le seul moyen de fonder un foyer, en échappant à
la dictature des roitelets nègres, trafiquants de chair humaine
sans complexe et sans contrôle. Emplois que les intellectuels
de chez nous ont fustigé avec indignation sous le nom de
« travail forcé ». prodigieuse expérience
pour Jean, qui apprend les hiérarchies secrètes et
implacables du monde tribal, les liens compliqués entre les
ethnies,
et aussi les dangers de tous les instants: le paludisme , la tuberculose,
les serpents omniprésents, les anthropophages qui sont bien
loin d'être un mythe, les crocodiles, les fauves, et toujours
la ruse et la cruauté des hommes. Et puis c'est le dur métier
d'exploitant forestier, un vrai bagne. Le travail épuisant,
la solitude de la brousse (son mariage avec une Française
n'y résistera pas), les escroqueries des employés
et les crocs en jambe des concurrents, les faillites et la ruine
lorsque tout paraissait acquis. « Me voilà brusquement
hanté par le destin de mon père, par le sort de tant
de pionniers que j'ai vus à l'oeuvre, mon enfance durant
; < ....> C'était leur lot à tous ; l'échec
après s'être décarcassé ; la maladie
ou la mort, toujours tout près du but. L'éternelle
loi de l'Afrique ».
On y trouve aussi la description fascinante du monde de la brousse,
l'hôpital de Lambaréné et le Dr Schweitzer comme
on ne l'a jamais décrit, le formidable travail des missionnaires,
l'intrusion de la guerre et la grotesque sécession des gaullistes
à laquelle personne ne comprend rien dans ce pays de bout
du monde, l'action si diverse et si lointaine de l'Administration.
Une foule de notations et, sans aucune prétention, un monument
pour l'Histoire ! Jean Michonet poursuivra sa carrière africaine
par mille vicissitudes, devenant armateur fluvial, chasseur de crocodiles,
transporteur, mais toujours broussard et toujours aventurier. Son
initiation au « bwiti », rarissime pour un Européen,
en a fait un Africain total. Toujours chutant, repartant à
zéro, maudissant cette terre dont il ne peut se passer, le
courage personnifié, l'image même du pionnier et du
colon, l'opposé de l'image du « colonialiste »
tel que l'ont inventée, et hélas répandue,
nos têtes pensantes en chaise longue. Cette vie, qui aurait
rempli trois vies, s'est achevée prématurément
à l'age de cinquante trois ans. Jean Michonet est mort noyé,
avec ses deux filles, en tentant de sauver ces jeunes enfants de
la barre traîtresse où
les retenait l'océan. Une dernière fois, l'échec
au bout du courage, tout un symbole. Une formidable leçon,
un récit qui ne vous lâche plus, l'Afrique comme on
ne l'a peut être jamais dite. Un très grand livre,
un livre d'Homme ! M.LAGROT
La Mémoire du Fleuve, l'Afrique aventureuse de Jean
Michonet
Ed. Phébus libretto 1999
COLONEL ARGOUD
"Je préférerais qu’on me jette des cailloux
pour m’être trompé, que de voir la France dans
cet état "
On mesure la flamme qui brûlait Antoine Argoud
pour sa patrie. Ce feu qui avait forgé sa force. Mais une
autre vertu aussi le caractérisait – comme l’a
rappelé son fils aîné à ses obsèques
– celle du cœur. Quel contraste, sur ce plan aussi, avec
"l’Autre", l’homme sec, haineux, sans pitié
pour personne, que Blondin appelait : " le tournesol de l’Elysée".
(*) Le colonel, en revanche, jusque dans les petites choses, a montré
sa générosité. A Toulon, il donne à
une mendiante qui avait un enfant dans les bras, un billet, en lui
disant : « la prochaine fois, vous viendrez avec un deuxième
sur l’autre bras, et vous en aurez un autre… »
Il possédait un respect infini pour la maternité.
En évoquant 14-18, sa première pensée allait
aux mères, aux épouses, aux gendarmes…Sa mère
lui avait si souvent parlé des femmes de Darney. Et il comprenait
la révolte des poilus massacrés souvent pour rien,
par de mauvais officiers…
Enfin, peut-être l’ultime manifestation de son âme
généreuse, (après bien des hésitations)
il accepta de recevoir le général Massu qui voulait
se réconcilier avec lui avant de mourir. Et le général
se présenta, à Darney, en grand uniforme, devant celui
qui avait tout sacrifié pour sauver l’Algérie.
Tout, famille, carrière, honneurs, pour tenir sa parole…Mais
son exigence d’âme ne s’arrêtait pas aux
grandes choses. A 85 ans, il enjambe une clôture de fils de
fer barbelé, pour couper les liens qui étouffaient
un arbre.
Sur son lit de mort, il montrait une noblesse inaltérée,
une sérénité profonde, empreinte de satisfaction.
Celle du devoir accompli envers et contre tous.
Un seul pauvre drapeau s’est incliné sur son cercueil,
celui des Anciens Combattants de Darney. A la même heure,
un porte-avions bien connu croisait sur la côte normande pour
rappeler qu’un général du même nom avait
débarqué là, trois ou quatre jours après
la bataille…Des hommages en proportion inverse à la
qualité des hommes. Mais chacun devinera où planait
l’esprit de Jeanne…
L’église était pleine des habitants de Darney,
(ceux-là même que le colonel avait pensé indifférents
à son combat, quand ils n’avaient pas été
hostiles…) qui lui ont rendu un hommage fervent. Le temps
a-t-il commencé de déchirer le rideau du mensonge
et de l’imposture ? Et puis le bilan du vainqueur est tellement
sinistre… Des paysans, des hommes de toute condition, ont
attendu la sortie du cercueil, d’anciens officiers et sous-officiers,
quelques anciens OAS, quelques Pieds-noirs, aucun Harki, ce long
cortège l’aura accompagné jusqu’au bout,
avec les gendarmes de la commune présents en uniforme.
A une autre époque, où l’élévation
d’âme n’avait pas encore complètement disparu,
Maurice Barrès était venu s’incliner devant
la dépouille de Jaurès. Et la fille du tribun socialiste
l’avait embrassé pour ce geste. Bigeard, qui n’habite
pas loin, se serai grandi véritablement –comme Massu-
en venant se recueillir devant cet homme d’exception. Mais
tout le monde n’est pas Barrès.
Après tout, Antoine Argoud aura remporté l’essentielle
victoire, celle du cœur. Et celle de l’Histoire viendra…
Luc BOIVIN
(*) Souvenons-nous que De Gaulle avait tenté de lui faire
perdre sa maison natale de Darney. Elle fut sauvée, par l’indivision…"C’est
beau, c’est grand, c’est généreux….."
NOUS NE CONNAISSONS PAS L’HISTOIRE…
Notre ami G Dillinger, dans un récent article
à "Présent", se faisait quelques remarques
judicieuses sur la situation de la femme en Algérie, le mépris
dont elle est affectée, et, à propos de notre ministre
des armées, notait : « que les Français aient
choisi un de ces êtres pour être le chef des guerriers,
le ministre de la guerre, est tout simplement une réalité
inconcevable pour l’esprit algérien traditionnel. Devant
de telles aberrations, ce n’est plus le mépris que
nous méritons de la part des Algériens, nous passons
dans un domaine qui n’appelle que la dérision. »
On ne saurait mieux dire…
Madame Alliot-Marie est-elle consciente de cet état d’infériorité
? Nul ne le sait, mais ses embrassades à répétition
avec le garçon de bains d’Oujda proclamé Président
de la République barbaresque en font douter… Mieux,
même, cette idylle lui confère le droit de donner des
leçons au vulgum pecus ; jugez-en par ses déclarations
à la presse à propos des protestations sur la présence
du garçon de bains aux cérémonies commémorant
le débarquement de Provence :
« Je trouve cette agitation déplacée. Ceux qui
participent à la polémique ont une méconnaissance
totale de l’Histoire. Nous sommes avant tout rassemblés
pour exprimer notre reconnaissance et remercier les citoyens de
ces pays qui ont combattu à nos cotés. »
Deux énormités en une seule phrase !
Le ministre nous permettra-t-elle d’observer que « ces
pays qui ont combattu à nos cotés » n’existaient
pas à l’époque, et qu’il était
donc difficile d’en être citoyen ? Qu’ils étaient
sujets français pour les colonies et citoyens français
pour les départements algériens, ce dont ils étaient
légitimement fiers…et qui leur semble dénié
aujourd’hui.
La première affirmation est plus extraordinaire encore :
« ceux qui participent à la polémique ».
-C’est nous les Pieds-noirs dont les pères ont fait,
de leur sueur, de leur sang, de leur jeunesse sacrifiée,
cette Histoire au nom de laquelle justement nous revendiquons la
liberté.
-C’est nous les Harki, qui, autres victimes de cette Histoire,
avons les meilleures raisons de la connaître plus que quiconque…
Etait-il utile qu’à l’ignorance, le ministre
ajoute la goujaterie, devenue hélas, une vertu féminine
? Etait-il nécessaire d’insulter ceux-là mêmes
que cette commémoration était censée honorer,
pour complaire à un président étranger hostile
qui n’a que mépris pour ces concessions et ne s’en
cache nullement ? Et ne peut-on s’interroger sur une raison
d’état dont le premier effet est de disloquer un peu
plus la cohésion nationale du dit état ? Hélas,
poser ces questions, c’est y répondre. -M.L
LA CHRONIQUE D’ALAIN-MICHEL ZELLER
A propos de l’article de Philippe de Saint-Robert dans "Valeurs
Actuelles" du 20 août dernier, Alain M. Zeller prend
à nouveau la plume pour dénoncer le parti-pris chiraco-gaulliste
de l’auteur, qui comme tout bon journaliste aux ordres et
politiquement correct a cru bon de dénigrer la légitime
colère de tous ceux qui se sont opposés à la
venue de Bouteflika et encenser la politique de Chirac.
Monsieur,
L’article que vous avez donné à Valeurs Actuelles
le 20 août s’inscrit bien dans la ligne de l’occultation
systématique du passé récent de l’Histoire
de France.
Habilement mais dérisoirement, vous taxez de "ressentiment"
tous ceux qui en dépit, souvent, de leurs "carrières
brisées" peuvent garder la tête haute, ayant beaucoup
perdu, fors l’honneur…
Parlons en d’honneur. En prenant pied sur le porte-avions
Charles De Gaulle, la devise que lut sûrement avec délectation
Abdelaziz Bouteflika n’était-elle pas : « Honneur
et Patrie » ?
Quelle dérision ! Mais il fallait que cela fût et cela
fût sur ce bâtiment baptisé du nom de celui qui,
de la façon la plus indigne, livra l’Algérie
au FLN de Bouteflika.
La boucle symbolique est bouclée !
Curieusement d’ailleurs, pas une fois dans cet article, vous
n’avez cru devoir citer le nom de De Gaulle dont vous êtes
habituellement le zélé thuriféraire.
N’en faut-il pas trouver la raison dans le fait que De Gaulle
a toujours abhorré cette Algérie à qui il devait
tout, vous le savez, et parler d’Alger en 1943 sans citer
les noms de Weygand, de Giraud, de Juin ou des Américains
(eh oui !) relève d’un singulier aveuglement ou d’un
parti pris médiocre !
La Justice et la Vérité, celle qui rend libre, sont
trop absentes de ces effusions officielles et artificielles pour
que quelque chose de durable soit construit. On ne fait pas une
grande politique avec des visas, des contrats d’armes, des
protocoles financiers ou en donnant des hochets !
Rendez-vous maintenant est pris pour le cinquantenaire de novembre
1954 et le début des massacres dans les Aurès.
Nul doute que le Président de la République, faisant
fi de ses "sentiments ou de ses émotions" ira faire
un grand exercice de repentance sous le regard paterne et sarcastique
de Bouteflika…
Vous pourrez dès lors nous commenter encore l’avenir
radieux qui attend la France…algérienne ! Courtoisement
vôtre. M.A ZELLER
TOULON : MENACES SUR LE CARREFOUR GÉNÉRAL
SALAN
Le 28 août dernier nous étions une
centaine à l’appel de l’ACUF, l’Association
des Amis de Raoul Salan, l’UNP et quelques autres à
rendre hommage au libérateur de Toulon.
La chose a du déplaire : il ne faut pas confondre libération
de la Patrie et ressentiment politique !
Et aujourd’hui quelques anciens porteurs de valises et leurs
amis :
Madeleine Rebérioux, Henri Leclerc, Dominique Voynet, Noël
Mamère, Robert Gaïc (député du Var), Robert
Alfonsi, Philippe Chesneau, Philippe Arcamone (conseillers régionaux
PACA), Danielle Daumas, Michel Clément, Bruno Marenzana (conseillers
généraux), Edmonde Charles-Roux, Louis Sclavis, P.A.
Boutang, Gérard Paquet, Giacobazzi, Pignon-Ernest, Henri
Alleg, Jacques Le Goff ("historien"), tous les conseillers
municipaux de Toulon…pétitionnent pour que l’on
débaptise le carrefour Général-Salan !
Pétition en trois langues : français, anglais et allemand
!!!
Et de surcroît, les pétitionnaires font appel aux Allemands
!
Comme l’écrit Alain Sanders dans Présent, dans
l’espoir que ce que les Allemands d’hier – chasser
Salan de Toulon- n’ont pu réaliser, des Allemands d’aujourd’hui
pourraient l’obtenir !
Les « amis » Allemands ont donc écrit au maire
de Mannheim (ville jumelée avec Toulon) :
Monsieur le maire, à la demande de nos amis français
de Toulon, membres de la ligue des droits de l’homme, nous
vous adressons leur pétition. Depuis les élections
municipales de mars 2001, les relations entre Mannheim et Toulon
ont repris un cours normal. C’est pourquoi nous vous demandons
de bien vouloir soutenir leur démarche. Un changement de
nom de carrefour contribuerait à une meilleure compréhension
pour les Français de leur passé en Algérie.
Pour remettre en cause le passé nazi de leur pays, les Allemands
ont bénéficié de l’aide d’autres
nations. Aujourd’hui, nous pouvons aider les Français
à remettre en cause le passé colonial de leur pays.
Prenons ces menaces au sérieux et soyons vigilants. Il ne
faudrait pas, après avoir rayé les Anciens Combattants
de l’Armée d’Afrique de l’Histoire de notre
pays, que l’on efface d’un trait de plume leurs chefs.
R.S.
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