Malgré les trombes d'eau qui se déversaient sur
Montpellier, vous êtes venus, nombreux, assister à
cette audience que l'on nous avait annoncée comme publique,
mais qui, dès que les places assises furent occupées,
s'est transformée, à s'y méprendre, à
un huis clos.
Nous nous en excusons auprès de ceux qui, sous étroite
surveillance policière, comme nous l'étions tous,
ont dû arpenter la salle des pas perdus mais nous les assurons
que leur présence n'a pas été inutile et
que, bien au contraire, elle a contribué à effriter
le mur du mensonge dont nous avons parlé plus haut.
Oui ! Nous pouvons affirmer, aujourd'hui, que, grâce à
cette audience, et a votre présence à cette audience,
nous avons écrit sur ce mur, en lettres de feu, la prophétie
fatidique faite au régent de Babylone - et nous vous assurons
que Philippe De Gaulle et ses avocats l'ont ressenti comme telle
- « Mane - Thecel - Phares ». (Compté, pesé,
divisé).
Oui comptés, les mensonges du fils pour exonérer
le père de ses crimes. Pesé le sang des Harkis,
soldats français, abandonnés au massacre comme un
« magma qui n'avait servi à rien ». Divisée
l'opinion française sur le Guide qui a aveuglé le
pays au point de lui cacher ce fleuve de sang...
En tant que témoin appelé le premier à
la barre, je crois avoir retracé, malgré mon émotion,
la barbarie du FLN dont j'ai eu, moi-même à souffrir,
la félonie de Charles de Gaulle, et l'innommable, la monstrueuse
forfaiture que fut la mascarade d'Evian à laquelle on fait
encore référence comme à des accords internationaux
!
M. Abolivier, second témoin, ancien officier, chef de
S.A.S., expliqua clairement comment le double piège de
l'abandon et des contraintes administratives se referma sur ces
populations qui avaient, de longue date, choisi la France, et
qui se trouvèrent désarmées et livrées
sans défense à la vindicte des hordes sauvages.
Un frisson d'horreur parcourut la salle et les magistrats lorsqu'il
évoqua la vision horrible de six cents harkis mutilés,
énucléés avant d'être égorgés,
« les yeux pendant au milieu du visage ».
Le troisième témoin, M. Forzy, Ancien Délégué
Ministériel en charge des rapatriés de toutes confessions
et auteur d'un véritable réquisitoire sur les crimes
gaullistes « Ça aussi, c'était De Gaulle...
» a confirmé en tout point les déclarations
des deux premiers témoins, apportant à leur témoignage
la garantie des Archives encore closes, dont ses fonctions lui
avaient permis de prendre connaissance et rappelant les ordres
donnés par Charles De Gaulle à M.M. Joxe et Messmer
pour interdire le rapatriement de ces Français-musulmans
menacés de mort.
La parole fut, ensuite, donnée à l'avocat des plaignants,
Maître Pierre Courbis dans une longue et
émouvante plaidoirie, ponctuée, comme un leitmotiv,
du rappel de la diffamation infamante de Philippe De Gaulle
« Et puis, tout le monde ne voulait pas partir comme ces
100.000 Harkis qui ont rejoint l'armée algérienne
».
La voix de Maître Courbis fut, souvent, éclatante
d'indignation, lorsqu'il dénonçait la manoeuvre
insidieuse de Philippe De Gaulle, lequel osait insinuer que les
victimes étaient mortes par leur propre faute ou leur erreur
de choix.
Elle était vibrante d'éxaspération lorsqu'il
indiquait qu'en 1962, il n'y avait, en Algérie,
que 90.000 Harkis, et non 100.000 Harkis, comme le prétend
Philippe De Gaulle, ce qui a amené la Présidente
du Tribunal à qualifier « d'aberration » la
déclaration incriminée.
Parfois pathétique, cette voix évoquait la barbarie
de cette impitoyable chasse à l'homme. Par moment, elle
était chargée de toute l'émotion ressentie
par ces rescapés d'un génocide perpétré
contre des milliers et des milliers de leurs frères d'armes.
Maître Courbis a, admirablement bien, défini
les responsabilités françaises du drame et démontré,
avec. brio, la portée et l'intensité de l'insoutenable
diffamation, atteinte insupportable à leur honneur, non
seulement de Français, mais de représentants de
l'Autorité française...
Suspendus aux lèvres de Maître Courbis, les Harkis
survivants présents ainsi que leurs enfants et toute la
communauté rapatriée, écoutaient leur avocat
exprimer leur désespoir, leur exaspération de voir
le fils De Gaulle vouloir faire porter aux victimes infortunées
le poids des abominables sévices et des cruelles mises
à mort subies par la seule volonté de son père.
Les larmes coulaient, silencieusement, sur tous les bancs et c'est
dans un sanglot que Maître Courbis a conclu : «
Les propos du fils de De Gaulle constituent pour eux un traumatisme
effroyable... »
Maître Zylberstein, avocat de Philippe
De Gaulle, après avoir interrompu Maître Courbis
à plusieurs reprises en indiquant que les Tribunaux n'avaient
ni à connaître, ni à juger l'Histoire, a imposé
à l'assistance un panégyrique sur la « grandeur
» du père, avant d'exonérer le fils en prétendant
que « lorsque certains de ces hommes ont rejoint l'armée
algérienne, la guerre était finie... »
Pitoyable argumentaire dans lequel il fut rejoint par Maître
Sallèles, avocat du « Midi Libre » également
cité qui prétendit que tous les Harkis avaient été
« démobilisés » avant les accords d'Evian.
Comment qualifier les plaidoiries adverses ? Méconnaissance
totale de ce qui est, pourtant, l'Histoire de France, ou influence
de la désinformation d'Etat ?
Au nom du Ministère Public, le Procureur, quant à
lui, ne s'est pas fourvoyé dans de telles arguties, mais
après s'être apitoyé sur le sort de nos frères
Harkis, il a préféré poser la question suivante.
Y a-t-il eu, ou non, diffamation ?
Nous notons au passage que cette affaire commence à faire
des vagues, puisque le 7 septembre, sur les ondes de Radio-Courtoisie
Pierre Messmer, ancien Ministre des Armées accusait Abdelalziz
Bouteflika d'être le principal responsable du massacre des
Harkis, et que même
Benjamin Stora, historien dont on connaît les sympathies
pro-FLN, affirmait, tout en déclarant au préalable
« je suis sincèrement désolé pour lui
mais je ne vois pas d'où il a sorti ce chiffre »,
que les propos de Philippe De Gaulle étaient « complètement
faux ».
L'affaire a été mise en délibéré
et le jugement sera rendu le 6 octobre prochain, mais
je puis vous assurer, en mon nom personnel, au nom de mon Vice-président
Maître René Blanchot, au nom de ma Déléguée
Générale Anne Cazal, au nom de mon ami Amar Boumaraf
administrateur de notre Comité, chargé des Harkis,
et en celui de tous les Harkis survivants, que VERITAS ne les
abandonnera pas et que nous irons, ensemble, devant toutes les
instances nationales et internationales jusqu'à ce que
JUSTICE
NOUS SOIT RENDUE !
IN VERITAS N° 96 Octobre 2005
Joseph HATTAB PACHA