Déplacement du ministre des affaires étrangères Douste Blazy 10 avril 2006 à Alger
visite de l' école supérieure Algérienne des affaires.

   
 
 

La coopération entre nos deux pays a contribué à la formation des cadres de l'Algérie : à l'heure actuelle, nous accueillons en France plus de 22.000 jeunes Algériens qui poursuivent des études supérieures

Mesdames et Messieurs,

Je voudrais vous dire tout d'abord le plaisir que j'ai à être parmi vous, aujourd'hui, dans cet amphithéâtre de l'Ecole supérieure algérienne des Affaires.

L'occasion m'est ainsi donnée, dès cette première journée de visite en Algérie, de rencontrer une grande diversité d'interlocuteurs : futurs cadres de l'économie algérienne, étudiants de mastère, jeunes cadres qui préparent eux aussi un mastère, enseignants et responsables français des établissements partenaires, chefs d'entreprise impliqués dans la réussite de ce projet, représentants de la Chambre algérienne de Commerce et d'Industrie et, enfin, représentants des autorités de l'Etat, qui se sont investis pour porter ce projet imaginé et lancé en mars 2003, grâce à l'initiative de nos deux présidents, dans le cadre de la Déclaration d'Alger, et avec l'objectif de renforcer la coopération culturelle, technique et scientifique entre nos deux pays.

Je me réjouis donc d'être avec vous aujourd'hui ici, dans l'Ecole supérieure algérienne des Affaires, votre école, qui confirme à l'évidence la réussite de la coopération voulue entre nos deux pays. Elle illustre aussi l'engagement efficace de partenaires privés et publics qui, ensemble, ont réussi le tour de force de traduire en actes concrets le dessein ambitieux qui leur avait été tracé dans un délai pourtant extrêmement court. La première promotion de préparation au MBA en formation continue a fait sa rentrée en janvier 2005, et aujourd'hui, nous sommes réunis dans ces bâtiments flambants neufs qui abritent cet établissement de prestige et d'excellence.

Soyons clairs : votre école symbolise, de la plus belle manière, la coopération franco-algérienne dans un secteur essentiel, celui de la formation des cadres du secteur économique, et pour un objectif majeur de notre partenariat : celui de relever les défis d'un monde en mouvement, alors que le phénomène de la globalisation ne cesse de gagner du terrain.

De longue date, la coopération entre nos deux pays a contribué à la formation des cadres de l'Algérie : à l'heure actuelle, nous accueillons en France plus de 22.000 jeunes Algériens qui poursuivent des études supérieures ; nous assurons d'ambitieux programmes de bourses ; nous contribuons à la formation dispensée dans les universités algériennes dans le cadre de nombreux programmes de coopération inter-universitaires ; nous participons, enfin, à la conduite de nombreux programmes de recherche franco-algériens.

Quel meilleur exemple pour confirmer que la coopération franco-algérienne s'inscrit dans la durée, celle de la fidélité et de l'amitié, y compris dans les moments les plus difficiles.

L'ESAA est le produit de cette continuité. C'est aussi une pierre nouvelle de l'édifice de notre coopération, parce qu'elle est au carrefour des préoccupations pédagogiques et des impératifs économiques de nos deux pays. Cette école a été voulue et pensée comme un instrument au service du développement et de la modernisation des entreprises algériennes ; mais elle représente aussi un atout majeur pour tous les entrepreneurs français, européens ou venant d'autres pays encore, qui veulent investir en Algérie.

Dans un monde en compétition où l'ouverture des marchés se traduit pour les entreprises de chaque pays par la nécessité d'être toujours plus performantes, la ressource humaine représente à l'évidence un élément essentiel du succès. De ce point de vue, l'ESAA apporte ainsi sa contribution au défi de la formation des cadres et de l'adéquation de cette formation aux besoins de l'économie de votre pays.

De la qualité de votre formation, dépend largement la capacité des entreprises où vous allez servir - où vous servez déjà pour certains d'entre vous - à se déployer sur un marché où il faut en permanence être capable de s'adapter et d'affronter une concurrence chaque jour plus redoutable. De cette qualité, dépend aussi la création des emplois de l'avenir pour tous ceux qui entrent aujourd'hui dans le système scolaire et prendront demain la relève.

La réussite de ce projet vient d'abord de l'engagement des principaux intéressés. J'ai déjà dit combien celui des étudiants était important. Je veux aussi évoquer le partenariat mis en place à l'ESAA à travers un consortium conduit par la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris, associant la Chambre de Commerce et d'Industrie de Marseille et l'Université de Lille II, en lien avec la Chambre algérienne de Commerce et d'Industrie. Je veux saluer aussi la contribution des entreprises qui ont misé sur l'ESAA, comme en témoigne le parrainage de plus de la moitié des 51 étudiants qui préparent actuellement le mastère ou encore la signature entre la Société Générale et votre école d'une convention assurant des prêts étudiants à des conditions très intéressantes.

Permettez-moi aussi d'évoquer l'engagement de l'Etat français et le concours des services de coopération de l'ambassade de France pour mettre en place la contribution apportée par les enseignants chargés de l'encadrement des cours, celui de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris qui assure la présence d'un directeur français à la tête de l'ESAA - directeur que je salue ici pour son investissement personnel et l'efficacité dont il fait preuve depuis sa nomination - l'engagement, enfin, de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Marseille qui doit fournir les rémunérations de jeunes experts venus renforcer l'équipe pédagogique.

Enfin, comment ne pas souligner, dans ce magnifique amphithéâtre, l'effort remarquable des autorités algériennes, et tout particulièrement de la Chambre algérienne de Commerce et d'Industrie, qui ont su faire de cette école un lieu de rencontre et d'échange à la hauteur de ses ambitions.

L'ESAA est donc née sous les meilleurs auspices. Le projet a été conduit avec célérité et efficacité. Il faut maintenant lui laisser trouver son rythme et prendre toute sa dimension. Dans le même temps, nous devons déjà songer à développer de nouvelles filières correspondant aux autres besoins de formation qui doivent accompagner le développement économique de l'Algérie. A cet égard, je peux vous annoncer d'ores et déjà que nos deux pays ont engagé les travaux pour préparer, sur le modèle de l'ESAA, la création d'un Institut Supérieur des Technologies.

Ainsi, l'ESAA prend toute sa part au sein de la coopération française dans le domaine de la formation universitaire et de la recherche. Vous me permettrez de souligner l'importance que la France accorde à cette dimension des relations entre nos deux pays : nous savons tous que ce qui relève de la formation humaine est complexe, souvent difficile à maîtriser, mais fondamental pour l'avenir. C'est le socle des relations durables entre deux pays C'est donc avec humilité que ces actions doivent être abordées, mais elles doivent être menées avec le souci d'échanger les expériences, de tenir compte des spécificités comme des rythmes respectifs, et de tirer mutuellement parti de la richesse de ces échanges.

Si nous prenons le recul nécessaire, nous mesurons aisément combien le temps a permis à nos deux pays de définir ensemble un partenariat fructueux. Nous savons le chemin parcouru qui a permis en particulier à l'Algérie, au cours des dernières décennies, de construire un réseau dense d'universités et d'établissements supérieurs et d'être au rendez-vous des défis posés par l'économie mondiale.

Pour y faire face, l'Algérie a pu compter, et peut encore compter aujourd'hui, sur l'appui résolu de la France où les universités partenaires, les établissements d'enseignement supérieur, les grandes écoles sont déjà mobilisées. Je me réjouis que les contacts et les négociations entre la Conférence des présidents d'universités et la conférence nationale des universités algériennes aient avancé significativement au cours des derniers mois. Elles donneront lieu, au cours des prochains jours, à la signature d'une convention de partenariat. Pour faire avancer ce chantier si remarquable, toutes les ressources disponibles sont nécessaires. Je voudrais saluer ici, en la personne du maire de Marseille, M. Jean-Claude Gaudin, et en présence des responsables de la communauté urbaine de Toulouse, le travail, déjà engagé et qui devrait se renforcer, des collectivités locales, départementales et régionales de mon pays. Celles-ci apportent un concours décisif pour l'accueil des doctorants et des futurs professeurs d'université que l'Algérie va former au cours des prochaines années.

Je souhaite saluer enfin M. Christian Margaria, président de la Conférence des grandes écoles dont la présence parmi nous témoigne de la volonté de nos grandes écoles de développer des partenariats d'avenir en Algérie. Il est important que nous continuions à nous mobiliser pour la création de pôles d'excellence dans le domaine de la recherche scientifique ou médicale, afin de faire surgir les talents et les compétences de demain.

En Algérie même, ces chantiers de notre coopération universitaire et de recherche sont identifiés : aide à la gouvernance universitaire, appui à la réforme des cursus, appui à la professionnalisation des filières, appui à la formation des formateurs, appui à la recherche par la poursuite et le renforcement de programmes conjoints.

Face à tous ces projets de coopération, deux mots me viennent à l'esprit pour qualifier la méthode qui doit nous inspirer dans la conduite de ce chantier : continuité et innovation.

Continuité, afin de capitaliser le travail déjà réalisé et fertiliser le réseau dense et complexe de relations et de partenariats tissés au fil des années.

Innovation, car l'ampleur des défis et la nouveauté des problèmes posés aujourd'hui nous obligent à faire preuve d'imagination, de capacité de changement, de réactivité pour répondre au formidable défi que représente l'arrivée prochaine de centaines de milliers de nouveaux étudiants : ceux-ci seront les acteurs du développement futur de l'Algérie ; par-là même, ils justifient les efforts placés dans la promotion de ces partenariats fructueux.

Le Haut Conseil de Coopération universitaire et de Recherche, mis en place à la suite de la déclaration d'Alger, doit répondre à notre volonté partagée de dynamiser notre coopération. Cette structure a déjà bien travaillé, notamment en mettant en place, dès 2006, 35 nouvelles licences et nouveaux mastères à dominante professionnelle qui assurent une formation adaptée aux besoins de l'économie algérienne. Elle doit aujourd'hui nous aider, par sa capacité de réflexion et de proposition, à penser des voies et des modalités nouvelles, indispensables pour répondre à l'ampleur des enjeux auxquels nous devons faire face. Je tiens à souligner que, à travers le développement de telles filières universitaires, se dessinent progressivement les grandes lignes d'une université franco-algérienne de demain à laquelle je suis particulièrement attaché.

La France - premier partenaire de l'Algérie - continuera d'aider l'Algérie à construire son avenir, en poursuivant et en renforçant son soutien dans la modernisation de son économie, la promotion de son enseignement supérieur, mais aussi dans les autres dimensions de notre coopération : la coopération institutionnelle et administrative, qu'il s'agisse de la protection civile ou de la formation des magistrats, la santé publique, ou encore la formation professionnelle. N'oublions pas, enfin, l'enrichissement mutuel des connaissances et des cultures par les échanges artistiques et culturels, le développement des médias, l'approfondissement de la maîtrise des langues étrangères.

Cette action de la France, elle se fera bien évidemment en complémentarité avec l'Europe qui apporte, dans tous ces domaines, un concours décisif. Au-delà, c'est tout l'ensemble francophone qui est mobilisé, puisque 27 universités algériennes sont membres actifs de l'Agence universitaire de la Francophonie.

Chacun peut mesurer les besoins spécifiques en ressources humaines qui sont induits par la nécessaire adaptation de l'Algérie à son environnement économique. Face aux évolutions en cours, la coopération bilatérale doit changer de dimension et de nature : elle passe d'une logique de financement à celle de transferts de technologie et de savoir-faire.

C'est ainsi que la coopération institutionnelle innove au travers des programmes d'appui aux structures publiques en charge de la conduite de la politique économique. Je citerai, par exemple, la coopération entre les deux ministères des Finances, qui abordent des thèmes aussi variés que la gestion de la fiscalité - avec l'accord de jumelage passé entre l'école des impôts de Kolea et celle de Nevers - ou encore la mise à niveau du cadastre en Algérie, avec la collaboration étroite entre la direction algérienne des domaines et la direction générale des impôts en France. De même, de nombreuses actions d'assistance technique et de formation au bénéfice des fonctionnaires du ministère algérien des Participations et de la Promotion des investissements sont assurés en France par l'Agence des participations de l'Etat.

Mais les opérateurs économiques eux-mêmes contribuent à cet effort général. Je saisis cette occasion pour observer avec satisfaction que les entreprises et, au-delà, tous les acteurs économiques de mon pays sont prêts à répondre présents à la demande de leurs partenaires algériens. Je ne cesserai, pour ma part, de les encourager à agir dans ce sens, car tel est notre intérêt commun.

Soyez assurés que les entreprises françaises ne considèrent pas le marché algérien comme une simple opportunité commerciale dans le cadre de contrats éphémères. Elles souhaitent, au contraire, établir une relation privilégiée et de long terme avec leurs partenaires algériens. Ceci implique aussi bien des programmes de formation que des transferts de technologie ou des partenariats techniques, commerciaux et financiers.

Les exemples aujourd'hui de partenariats originaux se multiplient entre des entreprises et des entités publiques : ainsi, dans le secteur des transports terrestres, les structures institutionnelles et les entreprises françaises vont s'associer pour appuyer les capacités de l'Institut supérieur de formation ferroviaire de l'Algérie.

Il en va de même dans le secteur aéroportuaire : la gestion d'un projet tel que celui de l'aéroport international d'Alger nécessite une grande expérience, qu'il s'agisse des phases de conception et de réalisation ou encore de la mise en exploitation. Le groupe des Aéroports de Paris va ainsi apporter son expertise au travers d'une assistance technique, en partenariat avec l'entreprise de gestion de l'aéroport d'Alger.

Dans le secteur de l'aviation civile, diverses institutions et sociétés françaises sont prêtes, dans le sillage des actions de coopération engagées, à soutenir la mise en place d'une Ecole nationale de l'aviation civile en Algérie. Ce projet de coopération, qui a déjà acquis une dimension concrète par des échanges réguliers entre institutions des deux pays, profite pleinement d'une expertise industrielle française reconnue internationalement.

En matière de services, enfin, des entreprises françaises sont amenées à créer aujourd'hui leur propre centre de formation. C'est le cas notamment de BNP Paribas, qui a ouvert à Alger un tel centre. Cette initiative ne se limite pas aux seuls employés de la BNP ; elle est ouverte aussi à tous les cadres du secteur bancaire algérien. Elle souligne ainsi le potentiel du secteur privé qui devient de plus en plus un relais indispensable de la coopération institutionnelle, et le créateur d'une valeur ajoutée qui bénéficie à tout le secteur bancaire.

Mesdames et Messieurs, chers Amis,

Vous êtes les acteurs de l'avenir de votre pays, les artisans de la construction d'une Algérie prospère, moderne et dynamique, que nous appelons tous de nos vœux.

Comme ministre des Affaires étrangères de la France, je suis honoré d'être ici parmi vous, pour constater aujourd'hui, de manière concrète, comment mon pays prend sa part dans l'œuvre de modernisation de l'Algérie. Rien de bien surprenant à cela : il est évident en effet que nos intérêts sont partagés et que nous avons ensemble un destin à bâtir. Celui de deux grands pays, situés sur chacune des rives de la Méditerranée, porteurs d'une longue histoire et animés par la volonté de permettre à cette région, qui leur est commune, de retrouver prospérité et stabilité. Notre passé, notre voisinage, notre avenir sont autant de raisons pour mener ensemble cette entreprise de renouveau indispensable si nous voulons tenir notre rang sur la scène du monde.

Nos deux pays, nos deux peuples doivent avoir confiance : ils possèdent des ressources exceptionnelles pour affronter la compétition internationale et faire entendre leur voix dans le concert des nations.

Mais, au-delà de leur destin propre, l'Algérie et la France ont aussi la responsabilité d'entraîner l'ensemble du monde euro-méditerranéen sur le chemin de la paix et du développement économique. Cette vocation commune, nous devons l'assumer sans crainte et avec détermination : elle nous oblige à être en accord avec nos principes et nos convictions. Mais elle donne à nos deux pays l'occasion de nourrir une haute ambition : celle de recréer, au cœur de cette Méditerranée qui a connu tant de divisions et de guerres, tant d'affrontements et de haine, des liens de solidarité et de partenariat pour la cause de la paix et du renouveau. Je sais que l'Algérie et la France sont capables de mener à bien cette lourde tâche. J'ai confiance dans nos peuples et dans la jeunesse de nos deux pays pour relever ce défi et nous imposer cette ligne exigeante. Ainsi nous serons fidèles à tout ce qui a fait la force et la noblesse de nos nations respectives. A nous, désormais, de nous engager résolument sur le chemin de l'avenir.

Je vous remercie./.