Le processus des relations entre la France et L’Algérie
est-il compromis ? Après la récente polémique
provoquée par les déclarations du président
de la République, Abdelaziz Bouteflika, lors de la célébration
du 60e anniversaire du 8 mai 1945, lequel avait comparé
les fours à chaux de l’armée
coloniale aux fours crématoires de l’Allemagne
nazie, et pour lesquelles avait réagi le Quai d’Orsay
en appelant au “respect mutuel” et “au souci
de vérité”, c’est au tour du FLN présidé
par Bouteflika de s’inviter à ce qui s’apparente
à une “guerre feutrée” entre les deux
pays.
Dans un communiqué rendu public, le 5 juin 2005,
et signé par son secrétaire général,
Abdelaziz Belkhadem, l’ex-ministre des Affaires étrangères
et représentant personnel du président de la République,
le FLN s’est élevé contre la loi
n°2005-158 du 23 février 2005 portant “reconnaissance
de la nation et contribution nationale en faveur des Français
rapatriés”, adoptée par le Parlement et le
sénat français. Dans son article 4 que “les
programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle
positif de la présence française outre-mer, notamment
en Afrique du nord, et accordent à l'histoire et aux sacrifices
des combattants de l'armée française.
Le parti FLN s’élève contre cette loi qui
consacre une vision rétrograde de l’Histoire et condamne,
avec la plus grande fermeté, cette volonté de justification
de la barbarie du fait colonial en gommant les actes les plus
odieux tels que les exterminations de populations et tribus, les
enfumages collectives, les déportations massives de populations
entières déplacées et réduites en
esclavage, les massacres du 8 mai 1945, la répression des
manifestations d’octobre 1961, les crimes impunis de l’OAS
et, d’une manière générale, toutes
les exactions commises contre les populations civiles innocentes”,
note le FLN. Pour l’ex-parti unique, cette loi dont “l’inspiration
colonialiste” est “manifeste”, risque même
de compromettre le processus de re-fondation des relations entre
les deux pays. “Le Parlement français (…) a
pris une lourde responsabilité pouvant remettre en cause
le processus largement entamé, sous l’impulsion des
présidents Bouteflika et Chirac, de le difficile re-fondation
des relations entre l’Algérie et la France”,
écrit-il. Mais autant cette loi intervient “curieusement”
aux yeux du FLN, à la veille de la signature du traité
d’amitié, façon de suggérer que des
forces y travaillent à le torpiller, autant elle révèle
le décalage entre la France officielle et l’opinion
publique, laquelle “presse les autorités à
l’expression, si ce n’est des excuses de l’État
français, tout au moins de la repentance pour le mal causé
par le colonialisme à tous les peuples colonisés
et, en particulier, au peuple algérien”. Pour le
parti de Bouteflika, “si l’État français
veut rendre hommage à ceux qui ont combattu sous sa bannière,
il demeure inadmissible que cet hommage puisse donner lieu à
une quelconque réjouissance des malheurs des peuples colonisés
(…)”. Dans le même contexte, il a appelé
le peuple français “pour qu’il manifeste sa
ferme opposition à cette entreprise”, selon lui,
de “falsification” et a invité les forces vives
dans les pays anciennement colonisés au devoir de “vigilance”.
Enfin, le FLN, qui se dit faire la distinction entre les forces
de progrès et les forces rétrogrades, a réitéré
sa volonté de promouvoir une réelle politique d’amitié
et de coopération avec le peuple français. S’il
est utile de noter qu’elle intervient au lendemain du désaveu
français à Chirac, il reste cependant à se
demander si cette sortie du FLN, venue sur le tard, n’est
pas plutôt destinée à une consommation interne.
Alger 6 juin 2005