Pik, le dernier des « Dix, du Salon du Rire d’Alger », nous a quitté.
Depuis un certain temps à la question « Comment ça va ? » Pik nous répondait : « J’attends … »
Ce qu’il attendait nous le savions bien, car il était déjà si près qu’il ne pouvait être plus prêt ! Aussi, merci à la grande Dame de lui avoir laissé tant de répit.
A 102 ans passés, en ce 12 mars 2008 jour de la Sainte Justine, comme le dernier « poilu » de la guerre 1914-1918, il nous a quitté au petit matin avec que de souvenirs … comme un clin d’œil à Michel Serrault qui dans un de ses films a eu cette très belle réplique concernant l’ordinateur : « Tant de mémoire et aucun souvenir … »
Depuis septembre 2000, il aura eu le temps de nous raconter une grande partie de sa vie à Bône la Coquette, qu’il aimait entre toutes.
Obligé de quitter son travail, sa terre et sa ville natales, en 1962, comme la majorité des Pieds-Noirs, il avait décidé de ne plus y retourner de son vivant, et même n’en parlait-t-il plus, c’était tout à fait fini cette Algérie là n’était pas la sienne.
Grâce à Pierre Matarèse qui avait été un de ses dessinateurs et Christiane son épouse, nous avons eu la chance de faire sa connaissance, alors qu’avec Yves, mon époux, nous étions entrés de plein pieds dans les recherches tous azimuts concernant l’Algérie Française, et Bône en particulier, cette rencontre fut d’une exceptionnelle richesse.
Il allait avoir 95 ans, et nous le sollicitions de tant de questions, exprimant une telle curiosité pour ce pays perdu et mal connu de nous, que nos espoirs après nos premières discussions nous semblaient bien minces et le temps allait-il jouer contre nous, nous le craignions … Aussi entre cette joie immense de prendre connaissance de son savoir, de son expérience, de ses souvenirs et anecdotes, et l’incertitude du compte à rebours de la vie s’est engagé un travail qui finalement a duré plus de quatre ans et au cours duquel nos rencontres, nos échanges se sont concrétisés dans l’écriture d’un livre « Pik, un siècle » imprimé en 2006, et qui obtiendra en novembre 2007 le Prix Spécial du Jury, du Cercle Algérianiste, venant ainsi couronner une vie bien remplie, rebondissant au fil des circonstances et des bonnes ou mauvaises fortunes.
Heureusement, la fragilité de l’entreprise s’est transformée en un trésor que nous partageons avec tous ceux qui ont lu, lisent ou liront ce livre, dans lequel Pik s’est exprimé à sa manière, pleine d’humour, illustrant ses pages de sa main, les enrichissant de caricatures, d’aquarelles, de croquis, de photos personnelles, Yves Marthot a complété le tout avec de très belles cartes postales anciennes, donnant à Pik l’occasion de se replonger dans sa jeunesse, lui qui avait connu cette époque et qui nous l’a ainsi contée.
Merci Pik, Roger Rosso nous vous gardons, avec tous ceux qui nous ont déjà quittés, affectueusement dans notre cœur.
Cathy Marthot. |