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UN TRAITE D’AMITIE FRANCO-ALGERIEN:
Oui à l ‘Amitié,
Non à de nouveaux accords d’EVIAN
 
 
En mars 2003, lors de la visite d’Etat du président Chirac en Algérie les deux pays ont déclaré conjointement que « La relation d'amitié et de confiance que la France et l'Algérie entendent établir entre elles se doit d'être à tous égards exceptionnelle et exemplaire » et il a été ainsi convenu de préparer un traité pour consacrer « de manière solennelle le partenariat d'exception qu'elle construit avec l'Algérie, sans oublier les pages douloureuses du passé qui relèvent d'un travail de mémoire qu'il convient de poursuivre entre nos deux pays. »
Il s ‘agit donc d’un traité d’amitié et non d’une seule coopération renforcée. Du moins du côté français, car l’amitié suppose le respect, la confiance, la vérité. Or depuis des mois les déclarations du président algérien n’expriment que la haine, le mépris, et la falsification de notre histoire
Certes des liens forts existent entre les deux peuples, mais les blessures de l‘histoire rendent nécessaire, comme préalable à un véritable rapprochement des deux Etats, une réciprocité des gestes et un respect mutuel.
Le travail de mémoire et de vérité doit être approfondi dans les deux pays ; peut-on décider l’amitié par un traité et tourner la page, avant de l‘avoir écrite ?
Enfin le secret et la précipitation qui président à la préparation de ce traité ne sont ni appropriés, ni démocratiques.
Pire, sans certains préalables, ce traité s’avèrerait sans aucun doute un marché de dupes plutôt qu ‘un rapprochement. Le précédent des accords d’Evian de 1962 n’est-il pas dans toutes les mémoires ?

La France a multiplié les gestes symboliques importants.
Ces dernières années, la France a multiplié les gestes de bonne volonté pour faciliter le rapprochement, comme :
- l’organisation de l’année de l’Algérie en France en 2003 ;
- les propos et les gestes symboliques lors de visite d’état du président Chirac en Algérie ainsi que celle de nombreux ministres ;
- l’attribution de la légion d’honneur à la ville d’Alger et l’invitation exceptionnelle de M. Boutéflika au fort de Brégançon lors de la commémoration du 60ème anniversaire du débarquement de Provence ;
- une remise de dettes de 250 millions de dollars malgré les dizaines de milliards de dollars de réserves accumulées grâce au pétrole et au gaz ;
- la déclaration de l’ambassadeur de France en Algérie contenant les excuses officielles de la France pour les massacres perpétrés lors de la répression des émeutes et des exactions dans le constantinois de mai 1945 en parlant de « la tragédie inexcusable qui s'y est déroulée » ;
L’Algérie multiplie les insultes à l’encontre de la France.

On a observé dans le même temps de la part des autorités algériennes, une succession de déclarations hostiles et de demandes de reconnaissance à sens unique: 
- Dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, le président algérien au cours de sa visite d’Etat en 2000, demande à la France sa repentance pour le fait colonial en parlant de «  la lourde dette morale des anciennes métropoles envers leurs administrés s’avère ineffaçable et imprescriptible » ; le lendemain sur Antenne 2 il déclare « que les conditions n’étaient pas encore venues pour des visites de harkis en Algérie, car c‘est exactement comme si on demandait à un français de la Résistance de toucher la main d‘un collabo »,
- les manifestations de l’année de l’Algérie en France ont occulté presque systématiquement la présence française et à la suite, l‘Algérie n‘a pas proposé une année de la France en Algérie .
- Lors de la visite d’Etat de J Chirac pas le moindre geste symbolique n‘ est venu du président algérien.
- Zohra Drif, numéro deux du sénat algérien, au cours d’une émission d’Antenne 2 en 2003 , a renouvelé l’insulte de « collabo » à égard des Harkis,
- lors de sa visite en France le 15 août 2004, M. Boutéflika n’a pas souhaité effacer les injures précédentes ou faire un geste sur la libre circulation des Harkis en Algérie.

La préparation d’un partenariat d’exception n’a pas modifié l‘attitude de M Bouteflika. Au contraire, en 2005, insultes et contrevérités historiques se multiplient à l’approche de la signature du traité : 
- pendant la récente campagne pour le référendum de réconciliation nationale après 15 ans de guerre civile, les Harkis (et aussi les Pieds noirs) ont servi parfois « de boucs émissaires ». Le président algérien déclarait ainsi que « la réconciliation nationale ne concerne pas l'amnistie des harkis, des pieds-noirs » qu’il ne pouvait pas «pardonner à ceux qui tentent de l'extérieur de s'immiscer dans les grands choix du pays.». Saïd Barkat, ministre de l’Agriculture, prenait le relais à Oran : « La majorité du peuple algérien est contre la venue des harkis en Algérie. Car ils sont des traîtres à leur pays et à leur nation, ces vendus et vieux gradés de la honte. Quant à leurs enfants, ils seront les bienvenues en Algérie, à condition qu’ils reconnaissent de facto les crimes de leurs parents »
- Le 8 mai 2005, M. Bouteflika n'a pas hésité à franchir la ligne jaune en comparant la colonisation française en Algérie à l'Allemagne hitlérienne, «qui ne se souvient des fours de la honte installés par l'occupant dans la région de Guelma ? Ces fours étaient identiques aux fours crématoires des nazis»
- M Bouteflika attaque régulièrement la loi du 23 février 2005 de reconnaissance en faveur des rapatriés, texte qui selon lui « représente une cécité mentale confinant au négationnisme et au révisionnisme », ajoutant « le colonialisme constitue l'un des plus grands crimes contre l'humanité que l'Histoire a connus » ;
- fin août, c’est une « repentance » en bonne et due forme que M. Bouteflika exige de la France en rappelant  « à nos amis en France, à ceux dont la conscience est encore vive, qu'ils n'ont pas d'autre choix que de reconnaître qu'ils ont torturé, tué, exterminé de 1830 à 1962, qu'ils ont voulu anéantir l'identité algérienne » ;
- Le président algérien a appelé la France « à faire son mea culpa pour les exactions commises durant sa présence coloniale en Algérie » et menacé « que le traité d’amitié  reste conditionné par une reconnaissance solennelle par la France des atrocités commises de 1830 à 1962 . »
La France courbe l’échine.
Face à cette avalanche d’agressions, le silence des autorités françaises est étourdissant.
Le président Chirac et le gouvernement répètent leur détermination à signer ce traité et ne tarissent pas de déclarations apaisantes, amicales quelles que soient les déclarations algériennes.
L’Etat français feint de ne pas entendre ces offenses réitérées, comme anesthésié ou hypnotisé par la chimère que semble représenter ce projet de traité d’amitié. La règle absolue est l’absence de réaction devant toutes ces insultes. L’impression donnée de vouloir ce traité à tout prix rappelle l’attitude lors des funestes accords d’Evian. Au diable notre passé, nos valeurs, l‘honneur de notre armée, la vérité historique, la défense de l’honneur de nos concitoyens Pieds Noirs et Harkis.

De ce fait les décisions importantes du gouvernement français ces dernières années sur la politique de reconnaissance comme la journée d’hommage national aux Harkis et le discours prononcé par le chef de l’Etat le 25 septembre 2001, la journée de commémoration du 5 décembre, et les aspects mémoire et reconnaissance de la loi du 23 février 2005, sont dévalorisés et des interrogations resurgissent.
On avait pu s’étonner de la réaction bien tardive et timide de l‘Elysée pour se dire « choqué », un mois après, par les propos du président Boutéflika à l’égard des Harkis, tenus lors de sa visite officielle de 2000 devant des millions de téléspectateurs français. On peut regretter aujourd’hui le secret et la discrétion entourant la préparation du Mémorial de la France d’Outre-Mer à Marseille et la lenteur de la création de la Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie .
Mais que penser de la proposition de notre ministre des affaires étrangère de créer une commission d’historiens français (agrées par Alger) et algériens pour « évaluer » une loi française ?

Certes, quelques medias, des pétitionnaires de métier ou des universitaires prisonniers de certaines idéologies accaparent le sujet et prônent l‘auto-flagellation, la culpabilité systématique de la France pour tout ce qu’elle a fait avant les indépendances, l‘occultation des victimes du terrorisme du FLN, au mépris de l’honnêteté intellectuelle la plus élémentaire. Est-ce une raison pour renoncer collectivement à une vision plus conforme à la vérité complexe de cette période et à faire respecter nos valeurs et la mémoire de notre pays ? C’est pourtant un enjeu capital pour les références historiques de notre jeunesse.
Une lâcheté diplomatique aux conséquences lourdes pour notre pays

Les conséquences de ces silences devant les offenses répétées ou les déclarations négationnistes du président algérien, c‘est d’abord une image dévalorisée de la France et de l‘Etat dans l’esprit de nombreux français. S’agissant de la colonisation française en Algérie et du conflit algérien le risque est de voir des réactions anti-harkis, anti-pieds noirs et anti-armée se multiplier et être admises par tous.

Comment les rapatries d’Algérie de toutes origines, Harkis et Pieds noirs unis par une communauté de destin tragique en 1962, qui ont payé le prix fort pour leur double attachement à la France et à la terre d’Algérie, ne se sentiraient-ils pas blessés, humiliés et sacrifiés ?
Comment les anciens combattants de la guerre d’Algérie peuvent-ils ne pas souffrir de l’image que nous imposent les autorités algériennes sans la moindre protestation des autorités françaises ?
Mais aussi comment les jeunes Français, quelles que soient leurs origines, ne seraient-ils pas perturbés par l’image odieuse de la France imposée par l’Algérie ? Comment respecter, aimer la France, se sentir membre de la communauté nationale, porteur de sa mémoire et de ses valeurs si la défense de la dignité nationale ne vient pas d’abord des autorités françaises elles-mêmes et de sa diplomatie ?

La vérité et des gestes réciproques en préalable au traité
L’amitié suppose d’abord le respect mutuel

La vérité, quelle qu’elle soit, doit être établie objectivement de part et d’autre de la méditerranée. En France ce travail a commencé , en Algérie les tabous liés à la guerre doivent être levés et pour cela il y a lieu de reconnaître le massacre de dizaine de milliers de Harkis et de membres de leurs familles après le cessez-le-feu ainsi que les assassinats ou enlèvements de milliers de Pieds noirs. Il faut une ouverture des archives pour que les chercheurs puissent étudier les épisodes les plus sombres de cette guerre.

Des gestes forts d’amitié et de respect pourraient accompagner cette amitié et cette confiance mutuelle, comme le fait de rejoindre l’organisation de la francophonie, ou bien la reconstruction à Alger d’un monument aux morts pour la France lors des deux guerres mondiales
Concernant nos compatriotes Harkis il faudrait enfin la libre circulation pour des séjours en Algérie et pour les familles des anciens supplétifs restées en Algérie la suppression des mesures vexatoires et discriminantes.
De même il doit y avoir un engagement de l’Algérie de protéger et de participer à la restauration des anciens cimetières français, civils et militaires.

Conclusion
Il apparaît que les conditions ne sont pas encore remplies pour qu’un vrai traité d’amitié soit signé entre les deux pays. Les étapes essentielles n’ont pas été franchies et le risque est grand d’accroître encore les malentendus et d’accentuer les blessures du passé. Il semble urgent d’attendre que des gestes réciproques et des relations apaisées viennent rétablir la confiance et le respect mutuel. Un traité d’amitié est particulièrement délicat avec l’Etat algérien d’aujourd’hui du fait du parcours de son président actuel. M. Boutéflika était et demeure un acteur important au sein du FLN, au pouvoir depuis l’indépendance et responsable en 1962 après les accords d’Evian de l‘assassinat de dizaine de milliers de civils Harkis et Pieds noirs. Aujourd’hui les gestes de respect, de vérité et d’amitié sont d’autant plus nécessaires.
De plus, ne serait-il pas contraire à nos intérêts et même désastreux pour notre image sur la scène internationale, de privilégier un Etat dont les autorités insultent régulièrement la France, au détriment d’autres pays de la zone avec lesquels notre pays doit aussi renforcer les relations étroites et amicales qu’elle déjà établies ?

De nouveaux accords de coopération traditionnels peuvent préparer cette marche vers un rapprochement durable avec l‘Algérie, mais comment cela pourrait-il l‘être à travers d’une part les offenses répétées de notre partenaire algérien et d’autre part pour la France une auto-flagellation, des gestes unilatéraux et l’acceptation de toutes les injures .

Sinon quelle que soit la forme diplomatique du document signé, ce ne sera qu’un marché de dupes, comme les accords d’Evian en 1962.

Ne laissons pas l’Histoire se répéter, ni les lâchetés diplomatiques d’aujourd’hui empoisonner les relations franco-algériennes de demain.
Les peuples algériens et français méritent mieux.

AJIR Association Justice, Information, Réparation pour les Harkis, le 20 octobre 2005