A l'Assemblée colère des députés contre les présidentes de séance du groupe des amateurs LREM

 

Colère noire sur velours rouge: déjà agités hier, les débats sur le texte de moralisation de la vie publique ont viré à la guérilla parlementaire ce mardi après-midi. Au cœur des débats de l'Assemblée nationale: la suppression du verrou de Bercy, une exception juridique qui confie au ministère l'opportunité des poursuites en matière de fraude fiscale.
Comme sa collègue Danielle Brulebois dans la nuit de lundi à mardi, la vice-présidente de l'Assemblée Carole Bureau-Bonnard, sans cesse aiguillée par les administrateurs du Palais Bourbon, a pourtant connu une séance difficile. Sa conduite des débats a été largement critiquée par les représentants de l'opposition, de droite comme de gauche, et jusque dans la majorité.

        
Vice-présidente (s) assemblée nationale Carole Bureau-Bonnard & Danielle Brulebois
( 2 ex PS) finalement le PS fait très fort il refile les deux bourriques aux amateurs de EM

Débat "incompréhensible"

Le premier à se rebeller contre le perchoir a d'ailleurs été un élu de La République en marche. Furieux que la présidente de séance passe au vote sans lui accorder la parole, le député des des Hauts-de-Seine Jean-Louis Bourlanges a quitté l'hémicycle avec pertes et fracas. "C'est une voie de fait inadmissible", a-t-il lancé. "Ben c'est bien", souffle alors la novice Carole Bureau-Bonnard.

Sous pression, la vice-présidente de l'Assemblée s'emmêle, appelle deux fois à voter "pour" un amendement en oubliant le vote "contre", invoque un problème de micro pour justifier sa confusion, et se voit finalement rappelée à l'ordre à trois reprises, d'abord par le socialiste Olivier Dussopt, puis par l'Insoumis Alexis Corbière et enfin par le Constructif Philippe Vigier.

    "C'est tout ce qu'on vous demande: simplement, qu'on puisse avoir le vote dans des conditions normales, ce qui ne s'est pas produit", réclame le représentant de l'Eure-et-Loir.

Suspensions en chaîne

Première suspension de séance, qui ne suffit pas à apaiser les esprits. Les députés de l'opposition contestent que la suppression du verrou de Bercy - un autre projet, avec le casier judiciaire vierge des élus, sur lequel la majorité semble beaucoup plus frileuse que le candidat Macron - soit examinée en même temps que les propositions a minima proposant son "aménagement".

Le président du groupe communiste André Chassaigne tonne alors: "Ça devient pénible. Vous menez ces débats d'une façon incompréhensible. Quand on a un amendement, l'amendement arrive au vote avant les amendements de repli (rédigés en cas du rejet d'un amendement principal, NDLR) ! Non seulement on a affaire à un rouleau compresseur, où l'opposition ne peut pas s'exprimer correctement et aller jusqu'au vote de ce qu'elle propose, mais en plus de ça il y a une confusion qui à mon avis est entretenue!"
La majorité appelle des renforts

Excédé, le Républicain Philippe Gosselin emboîte le pas du leader communiste.

    "On a déjà eu une suspension de séance, comme la nuit précédente... déplore le député de la Manche. La phase d'apprentissage, ça va bien! Ici, on n'est pas dans une phase d'apprentissage, on fabrique la loi! Il va peut-être falloir appliquer le règlement. Le principe, c'est que l'accessoire suit le principal!"

Nouvelle interruption de séance, reprise, et surprise générale: le président de l'Assemblée nationale François de Rugy est venu remplacer la vice-présidente pour reprendre en main une séance chaotique, dans laquelle la majorité est quasi-transparente. Le président du groupe

LREM, Richard Ferrand, a également accouru en renfort pour verrouiller le débat.



Alors qu’Emmanuel Macron avait promis de mettre en place une obligation de casier judiciaire vierge pour être un élu de la République, l’Assemblée nationale a finalement renoncé à ce dispositif.

Parmi les mesures envisagées pour être incorporées dans la loi pour restaurer la confiance dans la vie publique, l’idée d’une obligation de casier judiciaire vierge pour candidater à une élection figurait en bonne place, étant donné qu’Emmanuel Macron lui-même l’avait promis lors de sa campagne électorale.

Mais le projet a finalement été abandonné par la majorité parlementaire LREM le lundi 24 juillet 2017 à l’Assemblée nationale, au grand regret de certains.

Richard Ferrand sur la touche

Il faut dire que d'emblée, le projet de loi partait sur des bases friables. Préparé par l'ex-garde des Sceaux François Bayrou, contraint de quitter le gouvernement par l'affaire des collaborateurs d'eurodéputés MoDem, il devait être défendu par un groupe LREM cornaqué par un Richard Ferrand... lui aussi contraint de quitter le gouvernement à cause des affaires - en l'espèce les soupçons de favoritisme dans sa gestion des Mutuelles de Bretagne.

Or dès lundi, l'éphémère ministre de la Cohésion des territoires signait avec son groupe un amendement de blocage du texte visant l'obligation d'avoir un casier judiciaire vierge pour se présenter à une élection - promesse d'Emmanuel Macron... une initiative vite critiquée sur les réseaux sociaux.

Mercredi, lors d'une réunion à huis clos, il tente même de torpiller la suppression de la réserve parlementaire, cette enveloppe de 130.000 euros par an que chaque député peut distribuer comme il l'entend, aux associations ou collectivités.

Le député du Finistère oriente alors les discussions, insistant sur le fait qu'il ne faut pas créer une " usine à gaz ", raconte "le Parisien". La suppression de la réserve parlementaire sera pourtant actée le lendemain lors d'un nouveau vote de groupe.

Par la suite, Richard Ferrand s'est fait remarquer par son absence. Selon " le Monde " et " l'Express ", son autorité est de moins en moins reconnue par ses troupes, qui critiquent son manque de présence et son ton péremptoire. "On ne sait pas ce qu’il fait de ses journées, on le voit deux fois deux heures par semaine en réunion de groupe et ça s’arrête là", dénonce un député LREM auprès du "Monde". Un poids lourd de l'Assemblée ajoute :

"Sur cette loi de moralisation de la vie publique, je comprends que Ferrand se tienne à l'écart, c'est délicat pour lui".

A ces divisions se sont parfois ajoutées des erreurs de débutant. Jeudi soir, alors que les débats s'éternisaient, les députés de la majorité ont ainsi rejeté par erreur un article de loi... qu'ils avaient pourtant validé en commission. Salué par le député insoumis Eric Coquerel, cet article qui devait élargir les obligations de transparence fiscale des ministres a, en effet, été pris par inadvertance pour un amendement déposé par l'opposition !

"Il faut être attentif", a grondé le président de séance Sacha Houlié (LREM), abasourdi.
"Chers collègues, quand je mets au vote un amendement, c’est un amendement, quand je mets au vote un article, c’est un article."

Présidents de séance chahutés

"On n'est pas dans l'AG d'un club de boulistes !" Alors que les débats se tendaient en milieu de semaine, les présidents de séance LREM ont été régulièrement déstabilisés par l'opposition, mécontente de la gestion du temps de parole et multipliant les rappels au règlement - le chef de file des députés LR Christian Jacob en tête.

Dès lundi soir, la présidente de séance Danielle Brulebois, visiblement déboussolée par la tournure des événements, se faisait sèchement rabrouer par la socialiste Delphine Batho, règlement en main, qui s'insurgeait de l'impossibilité de défendre certains sous-amendements.

Mardi au perchoir, Carole Bureau-Bonnard ne semblait pas beaucoup plus à son aise, en faisant voter deux fois le même amendement. Elle arguait alors d'un micro défaillant pour dire que ses consignes n'avaient pas été entendues par certains, une version contestée par le socialiste Olivier Dussopt qui criait au non-respect des règles, avant qu'une suspension de séance ne soit décidée dans la confusion.

Un peu plus tard, l'expérimenté député MoDem Jean-Louis Bourlanges, exaspéré d'être privé de temps de parole par une présidente de séance visiblement déstabilisée, quittait l'Hémicycle. Carole Bureau-Bonnard était d'ailleurs remplacée par François de Rugy au perchoir pour la fin de séance.

Mercredi, alors que Danielle Brulebois était de nouveau perturbée par le chahut, malgré les conseils permanents du secrétaire de séance, la députée LREM Laetitia Avia volait à son secours en tonnant :

"Que l'on respecte la présidente dans cet Hémicycle ! Quelle triste image des députés vous donnez aujourd'hui à nos concitoyens !"

" La totalité des vice-présidentes et vice-présidents n'ont aucune expérience du fonctionnement de l'Assemblée ", déplorait jeudi André Chassaigne, chef de file des communistes, très critique lui aussi en séance.
"Vous menez ces débats d'une façon incompréhensible !", s'emportait-il mardi face à Carole Bureau-Bonnard.



Les amateurs de EM REM dirigés par le nauséabond Richard Ferrand