Aix-en-Provence

Samedi 11 Mars 2017 www.laprovence.com

Rapatriés et patriotes unis contre les propos de Macron

Une centaine de personnes se sont rassemblées hier place Jeanne d’Arc à Aix en Provence

En terme de réactivité, on peut mieux faire. Trois semaines après les propos d’Emmanuel Macron qualifiant la colonisation de "crime contre l’humanité" alors qu’il était en voyage en Algérie, le comité d’entente d’associations d’anciens combattants et patriotiques du Pays d’Aix appelait hier à un rassemblement devant le Mémorial des morts pour la France. "C’est un peu tard, concède le président du comité, Henri Garric, mais il nous a fallu le temps de nous organiser. ”

Reste que la blessure causée par le leader d’En Marche! Aux anciens combattants, pieds-noirs et harkis, est encore à vif.

Et même si Emmanuel Macron a dit quelques jours après son déplacement en Algérie "être désolé" d’avoir "blessé" certains, parlant de crime "contre l’humain" et non plus de "crime contre l’humanité", "le mal est fait", résume Robert Perez, président du collectif aixois des rapatriés, présent hier, place Jeanne d’Arc, non loin de Raoul Boyer, conseiller municipal FN et Edouard Baldo, élu de l’opposition PS.

"Ne nous insultez pas et de grâce, oubliez-nous !"

"Chacun d’entre nous à sa propre réponse aux propos tenus par un homme politique, de surcroît ancien ministre et comble de l’infamie, sur une ancienne terre française qui nous est devenue étrangère il y a 55ans", s’insurge Henri Garric dans un discours à peine audible dans le brouhaha continu de la place de La Rotonde toute proche. "La prochaine fois, faudra prévoir la sono", grommelle un porte-drapeau.

Le représentant des anciens combattants a choisi de répondre indirectement au candidat à la présidentielle car il lui paraît " illusoire de lui faire comprendre ce que représente ’le crime contre l’humanité’. Il n’était pas de ce monde en 1945 à la découverte des camps nazis. (...) Aujourd’hui, si vous ne souhaitez pas nous rendre hommage, pour autant, ne nous insultez pas et, de grâce, oubliez-nous.

Je vous rappelle que de nos jours, le Président de la République envoie des hommes au combat, donc éventuellement à la mort. L’essentiel de ces opérations extérieures se déroule en Afrique, ce qui laisse penser que ces engagements se font en vertu des intérêts particuliers de la France envers ces anciennes colonies. Cette politique néocoloniale a également ses morts. C’est au nom de tous ces disparus que nous sommes réunis devant ce mémorial pour témoigner qu’ils sont morts en héros et non en salauds. "

Au nom des rapatriés, Robert Perez ferme le ban: " Messieurs les bien-pensants, si vous pouviez de temps en temps dire un peu de bien de la France et cesser de mentir, de diffamer notre mère la France. Peut-être que chez vous, Monsieur. Macron, on a l’habitude de laisser insulter sa mère... Pas chez nous! "

Au premier rang, des larmes coulent à flots sur les joues de Rosalind, rapatriée d’Algérie à l’âge de 10 ans avec toute sa famille.

Elle est l’auteur du livre "Les ailes blanches d’Alger" paru à l’automne 2016 aux Presses du Midi et dédié, dit-elle, à ses parents " morts de chagrin ".

Caroline RICHARD

 
               
 

Le discours de l’organisateur principal Henri Garric

Discours de Henri Garric, Président de l'Association nationale des anciens et amis de l'Indochine et du souvenir indochinois (ANAI) et du Comité d’entente d’associations d’anciens combattants et patriotiques du Pays d’Aix (CEPA)

Mesdames, Messieurs,
Chers compagnons,

Chacun d’entre nous a sa propre réponse aux propos tenus par un homme politique, de surcroît ancien ministre et comble de l’infamie sur une ancienne terre française, qui nous est devenue étrangère il y a 55 ans.

J’ai choisi de lui répondre indirectement, car, il me paraît illusoire de lui faire comprendre ce que représente « le crime contre l’humanité », il n’était pas de ce monde en 1945 à la découverte des camps Nazis.

Comme il est tout à fait vain de lui faire prendre conscience du traumatisme de ces jeunes garçons de 20 ans confrontés à des groupes sanguinaires pour qui la révolte doit se traduire par des actes de barbaries. Non ! Ce n’est pas parce que ses prédécesseurs ont reconnu l’état de guerre dans un département français, que celle-ci s’est déroulée selon la convention de Genève !

Aussi vais-je m’adresser à ceux qui ont donné à la France leur jeunesse au service de sa mission civilisatrice et fait, par un ultime sacrifice, don de leur vie à la Patrie.

Commençons par ceux de 14/18, ce million et demi de morts pour la France, sont déjà les victimes de la colonisation – dans les buts de guerre de l’Allemagne, n’y avait-il pas le rêve fous d’obtenir un empire à l’identique de la Grande-Bretagne et de la France.

1940, la France est outragée, le personnel politique quitte le vaisseau fantôme et laisse à la barre un vieillard – oui j’ai bien dit un vieillard, car, qui de nos jours, après 77 ans de progrès constants de notre santé, imaginerait mettre au pouvoir un homme de 84 ans ?

Face à cette situation un général se rebelle et en appelle au peuple et ratisse large avec cette phrase : « mais il nous reste un vaste empire… ». Appel reçu 5/5, les colonies répondent présent et constituent cette belle armée d’Afrique pour libérer le Pays.
Ils seront nombreux à mourir pour la France et son empire.

N’est-ce pas ce même grand homme qui enverra un Corps Expéditionnaire en Indochine pour y récupérer la perle de son empire. Lui quittant le pouvoir, d’autres mèneront la guerre, sans pour autant la faire avec les moyens nécessaires à son succès.

C’est 100 000 autres morts pour la France et sa colonie.

Ils avaient mon âge et ils sont morts sur la terre que la France a confiée à nos ancêtres. Moi, Monsieur, cette terre que je nommai "France", je l’ai aimée et servi au péril de ma vie. Aveuglé par cet amour sans borne pour la France, j’ai cru aux bonnes paroles des dirigeants de 1954. Comment de pas croire le Ministre de l’Intérieur qui dit : « la rébellion Algérienne ne peut trouver qu’une forme terminale : la guerre », puis « l’Algérie, c’est la France ».

Ces paroles sont de Monsieur François MITTERRAND, Ministre de l’intérieur, dont dépend le maintien de l’ordre sur le territoire National, car à cette époque l’Algérie est département Français depuis 1848, et ce jusqu’en 1962. A cette date, une fois de plus berné par le pouvoir, c’est l’indépendance de l’Algérie. Si même nous pouvons admettre que cela était inéluctable, nous ne pouvons accepter l’abandon, des Français de toutes confessions, aux couteaux des égorgeurs. Ce choix fut d’autant plus ignoble, que ce peuple avait fidèlement servi sur les champs de batailles de 1870, 1914 et 1940 et dont nombre d’entre eux étaient devenus Français de par le sang versé.

N’y a-t-il pas là « crime contre l’humanité » ?

Pour mes compagnons et moi, 7 ans durant nous avons pacifié, protégé, éduqué, soigné et initié une nouvelle approche vers les populations de ce territoire. Nous y avons laissé 27000 morts et toutes nos illusions.

Aujourd’hui, si vous ne souhaitez pas nous rendre hommage, pour autant ne nous insultez pas et de grâce oubliez-nous.

Pour en terminer, je vous rappelle que de nos jours, le Président de la République envoie des hommes au combat, donc éventuellement à la Mort. L’essentiel de ces opérations extérieur se déroule en Afrique, ce qui laisse à penser que ces engagements se font en vertu des intérêts particuliers de la France envers ses anciennes colonies.

Cette politique néocoloniale a également ses Morts.

C’est au Nom de tous ces Morts que nous sommes réunis devant ce Mémorial, pour témoigner qu’ils sont morts en héros et non en salauds.

Chers compagnons disparus, nous gardons le souvenir de votre amour de la Patrie et du sacrifice consenti pour votre honneur et celui de la France.

Gloire à vous
Et vive la France.