« (…) Alors, l’histoire, même quand elle est tragique, même quand elle est douloureuse pour nos deux pays, elle doit être dite. Et la vérité je vais la dire ici, devant vous. Pendant 132 ans, l’Algérie a été soumise à un système profondément injuste et brutal. Ce système a un nom, c’est la colonisation, et je reconnais ici les souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien. Parmi ces souffrances, il y a eu les massacres de Sétif, de Guelma, de Kherrata, qui, je sais, demeurent ancrés dans la conscience des Algériens, mais aussi des Français. Parce qu’à Sétif, le 8 mai 1945, le jour même où le monde triomphait de la barbarie, la France manquait à ses valeurs universelles (…) La vérité, elle doit être dite aussi sur les circonstances dans lesquelles l’Algérie s’est délivrée du système colonial, sur cette guerre qui, longtemps, n’a pas dit son nom en France, la guerre d’Algérie. Voilà, nous avons le respect de la mémoire, de toutes les mémoires. Nous avons ce devoir de vérité sur la violence, sur les injustices, sur les massacres, sur la torture. Connaître, établir la vérité, c’est une obligation, et elle lie les Algériens et les Français. Et c’est pourquoi il est nécessaire que les historiens aient accès aux archives, et qu’une coopération dans ce domaine puisse être engagée, poursuivie, et que progressivement, cette vérité puisse être connue de tous.
La paix des mémoires, à laquelle j’aspire, repose sur la connaissance et la divulgation de l’histoire. Mais la nôtre est aussi une histoire humaine, car au-delà des blessures, au-delà des deuils, demeure la relation exceptionnelle nouée entre les Français et les Algériens ; les Français d’Algérie, instituteurs, médecins, architectes, professeurs, artistes, commerçants, agriculteurs qui, avec le peuple algérien, avaient su nouer, dans des conditions difficiles, intolérables parfois, des relations tellement humaines.
Notre histoire, cette histoire, c’est aussi celle de grandes consciences françaises, qui ont su s’élever contre l’injustice de l’ordre colonial, Georges Clemenceau, dès 1885, trouvat les mots pour dénoncer l’abus pur et simple de la force pour s’approprier l’homme et ses richesses. André Mandouze, moins connu, et pourtant, tellement militant, qui, toute sa vie, fut fidèle à ses valeurs dans la résistance, mais également dans la conscience de l’indépendance algérienne. Germaine Tillion, qui fut la militante inlassable du dialogue entre les hommes et les femmes, entre les peuples, l’écrivain François Mauriac, qui sut rappeler dans les moments difficiles la véritable grandeur d’un peuple qui ne repose pas sur sa force brutale, mais sur la puissance de son message universel (…) ».
Si l’on résume cette déclaration, la colonisation française en Algérie aurait été un « système profondément injuste et brutal » qui aurait « infligé des souffrances au peuple algérien ». Parmi ces souffrances sont cités trois exemples qui tous ont eu lieu, sur une période de 132 ans, au cours des mêmes journées de mai 1945 ! Les « grandes consciences françaises qui ont su s’élever contre l’injustice de l’ordre colonial » ne comportent aucun nom de dirigeant socialiste ! Pourquoi François Hollande n’a-t-il pas cité Jules Ferry, auquel il avait pourtant rendu hommage, au lendemain de son élection, dès le 15 mai 2012, ni Léon Blum ou Maurice Violette, auteurs d’un projet de loi visant à élargir le droit de vote à certains Musulmans, ni François Mitterrand ministre de l’intérieur en novembre 1954, puis ministre de la justice en 1956, lorsque Guy Mollet était président du conseil !
Le témoignage de François Hollande apparaît à la fois comme tronqué et tendancieux !
Tronqué, car, se situant dans la lignée du vote de la loi du 6 décembre 2012 relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement, François Hollande ne met en avant que l’injustice et la brutalité profondes du système colonial, en gardant sous silence tout ce qui s’est passé au lendemain du 19 mars 1962 ! Pourquoi d’ailleurs ne pas avoir prononcé un seul mot sur le drame des Français d’Algérie et des Français musulmans supplétifs de l’armée… à une époque où le Parti socialiste n’était pas au Gouvernement !
Tendancieux, car il s’agit, dans la lignée de la « reconnaissance de la sanglante répression de la manifestation du 17 octobre 1961 » exprimée le 19 octobre dernier, pour des raisons dogmatiques, politiques et électoralistes, d’une présentation peu objective des faits, visant à faire croire que la période de la colonisation française en Algérie aurait été une période d’injustice, de brutalité, et, partant, entièrement négative !
Une étude attentive des faits nous montre qu’il s’agit du contraire. L’installation des Français, à partir de 1830, dans ce qui n’était pas encore l’Algérie, a mis fin au système de domination ottomane, qui reposait sur la piraterie barbaresque et l’esclavagisme, pour mettre en place, au fil des années, une organisation, qui si elle n’a certes pas été parfaite, a apporté la paix, l’exploitation rationnelle des terres et du sous-sol, la mise en place des services publics (santé, éducation…) apportant un mieux-être et un bien-être aux populations, préparant ainsi les Algériens à prendre en charge leur destin !
Par ses déclarations, François Hollande a montré que sa démarche ne se situait pas dans une démarche d’un chef d’État se situant au-dessous de la mêlée, mais dans celle d’un dirigeant partisan !
Didier BÉOUTIS |