40e anniversaire du Cercle algérianiste - Perpignan 9 et 10 novembre 2013 -
1ere Partie - Hommage à Hélie Denoix de Saint Marc- Du Tarn et Garonne  à Frendah - Pourquoi relever aujourd’hui le défi Algérianiste.-
 


40e anniversaire du Cercle algérianiste 1200 congressistes ont répondu à l’appel

40 ans, quel bel âge que celui du Cercle algérianiste qui a su ouvrir un chemin novateur dans le combat mémoriel et culturel mené par notre communauté. Cet anniversaire fut incontestablement un grand moment d’émotion, d’expression de fierté de nos racines, mais aussi d’échanges et de rencontres avec la présence de plus de 80 auteurs participants au Forum algérianiste du livre. Perpignan, son Cercle local, et l’équipe entourant Suzy Simon-Nicaise ont, à nouveau, su montré toute la place qu’ils tenaient au sein du Cercle algérianiste.

Ces 40 bougies soufflées en présence des 40 présidents de cercles locaux sont, non seulement l’illustration de l’œuvre immense accomplie par les algérianistes depuis la création du Cercle en 1973, mais cet anniversaire a été aussi l’occasion d’exprimer notre volonté et notre détermination à poursuivre le combat pour la reconnaissance de nos drames et pour qu’éclate enfin la vérité historique.

Thierry Rolando, Président national du Cercle algérianiste

Une partie des 40 présidents sur scène, entonnant le « Chant des Africains ».
Thierry Rolando et Maurice Calmein, « D’hier à aujourd’hui, le Cercle algérianiste… »
Suzy Simon-Nicaise, Thierry Rolando et Jean-Marc Pujol.


Hélie Denoix de Saint Marc

Notre congrès a débuté par cet hommage. Parce que l’actualité – sa disparition récente - le commandait, mais bien plus que pour cela : parce qu’une nouvelle fois, une ultime fois peut-être, il s’adressait à nous.
Sa voix douce et grave a empli la salle, mais elle a surtout empli nos coeurs.
Son visage respirant la bonté, l’humilité et la transcendance, a empli le grand écran, mais surtout s’est gravé en nous. Et cet hommage fut écouté dans un silence que l’on peut qualifier de religieux, tant il nous venait de haute altitude. Hélie de Saint Marc, membre du Cercle algérianiste, nous l’avons dans notre souvenir comme ce commandant du 1er REP passant ses officiers en revue devant le lycée Bugeaud, sur fond d’avenue de la Marne, ce matin du 22 avril 1961 à Alger, et l’Algérie scelle à jamais entre lui et nous un pacte de sang. Mais, il a su nous faire ressentir la déchirure de la fascinante Indochine, et la brûlure des conditions honteuses de sa perte. Et cela a scellé entre lui et nous un pacte d’honneur. Enfin, par-dessus tout cela, par la leçon qu’il nous laisse de sa vie, toutes épreuves endurées, assumées et surmontées, il nous hausse, en nous montrant son exemple, vers des sphères nous délivrant des bassesses de notre temps.
Pierre Dimech


Du Tarn et Garonne  à Frendah


Pierre Baron et Josy Llop.

Lorsque Pierre Baron confie un paquet de lettres familiales datant du début du XXe  siècle, au Centre de Documentation des Français d’Algérie, il ne se doute pas un seul instant qu’elles feront l’objet d’une présentation lors d’un congrès national des Cercles algérianistes. Et pourtant !
Alors qu’en ce début du XXIe siècle, on continue de stigmatiser la communauté des Français d’Algérie comme un ramassis de « colons avec cigares, montés sur cadillac », ces lettres émouvantes sinon poignantes, témoignent de la dure réa- lité qu’eurent à  affronter ces centaines de familles de pionniers auxquelles étaient confiées, conditionnellement, des concessions à défricher  avant toute mise en exploitation.

Ce  témoignage  épistolaire  vient  à  point  pour  dénoncer  l’idée  reçue d’Européens rapaces s’emparant des terres de malheureux Arabes, condamnés à les exploiter misérablement au profit de leurs nouveaux maîtres.

C’est avec sa grande expérience en matière d’art dramatique, son talent et sa sensibilité de Française d’Algérie que  Josy Llop a fait revivre une femme fragile mais courageuse, toute dévouée à ses enfants, luttant par tous les moyens pour contribuer à leur subsistance.

On imagine volontiers la surprise du métropolitain, mal informé, découvrant une femme de « colon » faisant des ménages, des lessives et du repassage, pour assurer les fins de mois du foyer et chausser et vêtir ses enfants. On comprend tout autant sa surprise lorsqu’il découvre que les  rigueurs  climatiques  et  les  maladies  ruinent  les récoltes et, avec elles, le malheureux agriculteur qui doit se reconvertir en charretier avec, pour seule aide, celle de son aîné encore enfant.
Comment ne pas être ému par cette femme prématuré- ment vieillie dont le seul vrai souhait est de pouvoir un jour revoir ses parents ? La mort l’emporte avant qu’il ne puisse se réaliser.


Frendah.

Merci ami Baron d’avoir confié ces lettres à l’intérêt historique inestimable et de les avoir présentées au côté de Josy Llop avec cette simplicité qui sied aux hommes de bonne race.

Jean-Pierre Brun


Table ronde : Pourquoi relever aujourd’hui le défi Algérianiste

Sur scène : Julien Simon, Sandrine Morales, Bernard Cini, Françoise Leroy et Patrick Mazet, interrogés par Olivier Parra.

Quel plaisir de voir quatre de nos plus jeunes présidents de Cercles évoquer ce sujet important pour l’avenir de notre mouvement et de notre peuple déraciné !
Contrairement aux interventions, certes très appréciées aussi, d’experts de questions qui nous préoccupent, cette table ronde a donné la parole à Françoise Leroy (Clermont-Ferrand), Sandrine Morales (Limousin), Bernard Cini (Valence et secrétaire-général du Cercle national), Patrick Mazet (Normandie) et Julien Simon (Paris).

La fraîcheur et la spontanéité de leurs propos nous ont conduits à nous interroger sur la difficile question de la transmission du flambeau algérianiste aux jeunes générations.
Comme le soulignait Françoise Leroy, il n’est pas facile de transmettre cet héritage à ceux qui n’ont pas vécu là-bas et n’ont pas connu la guerre civile qui nous a marqués à vie. D’où  l’importance de leur léguer « des éléments de vie pour les tremper dans un bain d’Algérie ».

Pour le tout nouveau président du Cercle de Normandie, le besoin s’est fait sentir de créer ce Cercle et de s’y impliquer avec pour objectif d’atteindre « une masse critique » dans cette région. « Le défi, précise-t-il, c’est de trouver les moyens, dans le fond et dans la forme, d’intéresser ceux qui nous suivent ». Et Patrick Mazet de citer par exemple la généalogie, qui suscite la curiosité pour les parents, les grands-parents et l’histoire familiale. Mais il y a encore d’autres pistes, comme le soulignaient aussi les autres participants, ainsi le besoin de rendre justice à la communauté pied-noir ou les leçons à tirer de notre histoire pour mieux aborder l’avenir.
Pour Bernard Cini, le rétablissement de la vérité sur les 132 ans de présence française en Algérie, à l’école, dans les médias et les discours politiques apparaît comme un préalable qui interdit de baisser les bras. « C’est à la jeune génération de poursuivre le combat commencé il y a quarante ans pour défendre la mémoire de ceux qui ont construit ces beaux départements français.
Et notre histoire ne doit pas être réduite à la seule « guerre d’Algérie », comme le font certains ouvrages ».
Les cinq intervenants se sont montrés unanimes sur le fait que les critiques injustes entendues à l’école ou ailleurs n’ont fait que conforter leur motivation à s’engager.
Le plus jeune, Julien Simon, né en septembre 1981 à Perpignan et président du Cercle de Paris depuis juin dernier, confie que pour lui, « relever le défi algérianiste c’est un peu une affaire de famille », son engagement faisant suite à celui de ses parents et grands-parents, notamment de sa mère Suzy Simon-Nicaise. « Cette histoire est aussi la mienne et je ne peux me résoudre à la laisser tronquer, déformer ou oublier ». Et Julien précise le déclic qui l’a poussé à s’engager plus activement : « Une collègue de travail, Vendéenne et Bac +
5, me répondit, il y a deux ans, en apprenant que j’étais d’une famille pied-noire : « Pourtant tu es blond aux yeux bleus » ! Après quelques remarques de ce type, j’ai compris que certains de mes amis et collègues n’ont aucune idée de ce qu’est un Pied-Noir et ne connaissent rien de notre histoire ».
Sandrine Morales, elle, n’hésite pas, et à juste titre, à s’affirmer Pied-Noire, même si elle n’est pas née en Algérie. Comme Julien, elle estime que le cercle familial est le lieu essentiel de transmission de l’histoire et des valeurs. Et en les écoutant, je me disais que le sens de la famille qui nous caractérise s’est sans doute trouvé renforcé par le fait que la famille est finalement le seul lieu où l’on ne subit pas les agressions et mensonges de l’extérieur, on peut s’y exprimer en confiance et cela renforce notre solidarité.
Accord enfin sur la nécessité de rendre notre histoire intelligible aux plus jeunes. A cet égard, ces nouveaux responsables disent avoir appris avec intérêt l’idée d’un groupe d’Algérianistes d’écrire un petit document à l’intention des futures générations afin de leur permettre, le moment venu, de reprendre le témoin. Un débat à poursuivre, assurément !
Maurice Calmein