Motion remise au prefet de Perpignan par la section locale de - Non au 19 mars
Suite au projet sénatorial portant reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du recueillement et du souvenir - PROPOSITION de Loi sur le 19 Mars 1962 est un risque grave de division !!
Seule une mémoire partagée peut renforcer la cohésion nationale.
A L' attention de Monsieur le Président de la République :
(Sous couvert de Monsieur le Préfet des Pyrénées Orientales)
Monsieur le Président de la République,
Le projet de Loi au Sénat, portant sur la journée du 19 mars comme journée nationale du souvenir de la guerre d'Algérie, a été reporté au 20 novembre 2012. Il semble qu'une petite minorité de sénateur ait fait défaut pour l'obtention d'une majorité immédiate en vue de son adoption. Maintenant nous apprenons que ce projet est inscrit à l'ordre du jour sénatorial le 8 novembre 2012.
Ces ruses de procédures ne sont pas dignes d'un débat démocratique et l'expression de la majorité des anciens combattants non retenue.
N'oublions pas de préciser que la République a opté, en 2003, pour le 5 décembre comme la journée nationale de recueillement. Une autre Loi en date du 28 février 2012, votée par la très grande majorité des parlementaires, assure que la mémoire de TOUS les Morts pour la France est honorée le 11 novembre en même temps que la victoire et la paix. Ces dates en principe neutres cristalliseraient moins les passions voire les rancoeurs toujours vivaces.
Aussi, comment ne pas être exaspéré devant la négation ressentie de ce qui s'est passé après le 19 mars 1962. Il y eût plus de morts et de disparus après cette date que sur la totalité de la guerre d'Algérie où le taux des pertes s'élève à plus de 80 %. C'est dire l'iniquité ou l'hémiplégie, à l'égard des souffrances de milliers de personnes, suite au non respect délibéré et constaté, par tous nos consuls et autorités d'alors, de l'application des accords d'Evian sur le territoire algérien. Ils furent appliqués, il est vrai, mais seulement par nos troupes dont l'ordre donné fut de ne plus intervenir.
A noter cependant une exception de taille, la fusillade, pendant une dizaine de longues minutes, par l'Armée Française de la rue d' Isly à Alger, le 26 mars 1962, sur des civils désarmés. Restèrent sur le pavé algérois près de 50 morts et plus d'une centaine de blessés à la suite d'un hypothétique coup de feu tiré par un inconnu qui ne fit aucune victime militaire. Cette manifestation était un soutien aux habitants du quartier de bab el oued qui subissaient un blocus de plus de trois jours avec une mitraillade terrestre et aérienne.
Et l'on prétend encore de nos jours revisiter l'histoire sous prétexte que d'autres armistices ou accords furent toujours ternis par des incidents.
Cette banalisation serait un outrage à la mémoire des :
- 2021 disparus, civils et militaires, dont les corps n'ont jamais été retrouvés (arrêté au 31 décembre 1962 et encore évolutif),
. dont 1336 disparus après le 19 mars 1962,
. dont 685 disparus avant le 19 mars 1962.
- Enfin comment pouvoir ignorer malgré toutes les garanties affirmées consécutives aux accords signés :
. les tueries innombrables commises, après le cessez le feu, sur des femmes, enfants et hommes désarmés,
. les plus de 800 personnes martyrisées à Oran le 5 juillet 1962 au cours d'un abominable pogrom finalisé au petit lac,
. les plus de 70.000 harkis abandonnés avec une solution finale la plus effrayante que l'on puisse imaginer.
. tout cela dans un contexte d’incitations aux départs des européens par la terreur.
L'exode et la détresse de près d'un million de personnes, les massacres de nos compatriotes et harkis doivent-ils être considérés comme variable d'ajustement ? Si l'on veut attiser des feux mal éteints et raviver des tensions on ne s'y prendrait pas autrement. L'intérêt électoraliste et politique momentanés doivent t'ils primer sur des mémoires particulièrement meurtries ? La date antérieure retenue du 5 décembre avait le bénéfice de la neutralité en tentant de rassembler le monde associatif des anciens combattants. Tout comme celle du 11 novembre dédiée à tous les morts pour la France. Seule la FNACA, minoritaire, a toujours milité contre.
Le rapporteur de ce projet, le sénateur du Puy de Dôme NERI Alain, affirme soutenir les demandes de 350.000 anciens combattants issus de la FNACA alors que près 1.200.000 vétérans d'autres associations sont absolument contre. Ce refus de prendre en compte l'expression majoritaire est totalement incompréhensible sauf d'admettre éventuellement d'autres possibilités, dont l'une peut être idéologique en vue d'une reconnaissance de fautes, voire d'une repentance larvée, toujours refusée par les Présidents de la Vème République y compris par Monsieur François Mitterrand. L'aveu compassionnel, précisé quand même, à l'égard des victimes, civiles et militaires, de l'après 19 mars 1962 ne peut occulter le déni anachronique du choix de cette date, cinquante ans plus tard.
Quant à l'Algérie, elle considère cette date comme une victoire, ce qui est son droit le plus absolu. Devons nous pour cela la rejoindre ?
Il est vrai que la propension de notre pays, à s' associer aux commémorations des autres, semble déroutante à l' instar de l' envoi de notre porte-avions aux festivités, en 2005, du bicentenaire de la défaite de Trafalgar, en oubliant d' honorer, la même année, la plus belle de nos victoires Austerlitz. Comprenne qui pourra !
En s’inspirant de personnalités aussi différentes que les Présidents de la République qui se sont succédés et qui ont tous refusé cette date du 19 mars, chaque Sénateur devrait pouvoir s’exprimer en son âme et conscience :
-Soit rejeter cette proposition de loi au nom de l’unité et d’une mémoire collective apaisée confirmant le sens du vote de la loi de février dernier,
-Soit choisir de réveiller une division profonde entre français de toutes catégories et de toutes origines en la votant pour satisfaire une fraction minoritaire du monde combattant.
Est-ce bien opportun d'attiser encore des tensions en négligeant à dessein certains alors que d'autres seraient à ressasser l'aspect victimaire ? Nous savons aussi que de l'autre côté de la méditerranée il eût également beaucoup de victimes suite à cette guerre asymétrique sans pour autant que la responsabilité globale soit imputée exclusivement à notre Pays.
Le constat attristant de ce combat mémoriel, encore 50 ans plus tard, nous laisse subordonnés à la sagesse légendaire et espérée des membres du Palais du Luxembourg, pour trouver des raisons objectives à s'affranchir d'une décision politique blessante et considérée par beaucoup comme humiliante. Nous souhaitons ardemment que la raison l'emporte en repoussant ce funeste projet. Sinon nous formulons l'espoir que cette motion, déposée à la Préfecture des Pyrénées Orientales, soit étudiée avec soin et compte tenu de nos qualités républicaines restons encore dans l'espérance.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Président de la République, à l'expression de notre très haute considération malgré notre infini désarroi.
A Perpignan, le 7 novembre 2012 -
Délégué 66 -
Pour le Collectif - NON au 19 MARS 1962
Jean-Claude ROSSO -
Chevalier de l’Ordre National du Mérite (à titre militaire) - Yves SARTHE, Marcel SIMONET, André FABREGUE |